Alors que la campagne des municipales entre dans sa dernière ligne droite, Julien Poix et ses colistiers de La France Insoumise ont livré leur dernier match préparatoire avant la rencontre décisive du 15 mars, lors d’un meeting qui a oscillé entre tacles à la gorge des autres candidats et exercice d’auto-persuasion que la victoire est possible. Les députés Adrien Quatennens et Ugo Bernalicis étaient présents pour soutenir l’équipe locale de 61 joueurs lancée à l’assaut du Beffroi. De quoi faire vibrer à l’unisson la centaine de supporters présents dans les gradins.
Le stade
Pour son ultime sortie, à cinq jours du scrutin, LFI a choisi le Gymnase, place Sébastopol. Pas sûr toutefois qu’on puisse parler de démonstration de force. La salle de 400 places a été savamment aménagée pour accueillir une centaine de personnes, sans laisser trop d’espaces vides apparents. Le lieu est agencé façon arène : le terrain central est entouré des quatre tribunes de supporters. Les nombreux projecteurs et la playlist éclectique (d’American Idiot de Green Day à L’aventurier d’Indochine) d’avant-match promettent du spectacle.
L’ambiance en tribune
Des Insoumis de tous âges – jeans‐baskets ou costards‐talonnettes – se mélangent dans la foule. Des applaudissements s’échappent des quatre coins du Gymnase. Les supporters sont attentifs, aucun dribble ne doit être manqué.
A la mi‐temps, les têtes se lèvent. En haut des gradins, les deux acolytes du PAP’40 de l’Eglise de la Très Sainte Consommation, micro‐parti maniant l’ironie qui s’est présenté aux municipales 2014 mais ne rempile pas cette année, créent la surprise. « On veut tous voir vos doigts d’honneur levés ! », haranguent‐ils, en soutanes et baskets dorées. Le public est réceptif : les majeurs se lèvent de bon coeur. Il n’en faut pas plus aux supporters survoltés pour lancer une ovation. Julien Poix avait‐il besoin de ces chauffeurs de salle pour s’assurer de l’engouement des troupes ? Ou était‐ce une manière de les motiver pour le dernier but à marquer ? Toujours est‐il que la plaisanterie prend puisque tous entament le même refrain : « On a gagné ! ».
L’équipe
Derrière un Julien Poix affûté, ayant annulé tous ses matchs de la semaine face à ses élèves du collège de Saint‐Amand‐les‐Eaux où il enseigne l’histoire-géographie, une équipe de joueuses encore peu expérimentées : Elodie Cloez (2ème de liste et étudiante en science politique); Adria Madelin (6ème de liste et militante pour le droit au logement); Fanny Jouan (4ème de liste et militante écologiste). Chacune bien campée dans sa spécialité. A noter : le renfort des membre de l’équipe de France de LFI, Ugo Bernalicis et Adrien Quatennens, les deux députés LFI du Nord, venus pour des entrées en jeu d’une dizaine de minutes. Les têtes de liste des communes associées, Lucas Fournier pour Hellemmes et Jimmy Golygowski pour Lomme, eux, sont restés sur le banc de touche.
Le résumé
Après une demi‐heure d’attente, le public commence à taper des mains au rythme de la musique. Julien Poix monte sur l’estrade sous des applaudissements. Mais c’est Élodie Cloez, sa numéro deux, qui prend d’abord la parole afin de remercier toutes les personnes présentes en ce lundi soir.
Le coup d’envoi est donné. Ugo Bernalicis s’empare aussitôt du ballon. Sa tactique du soir : attaquer La République en Marche. « Ce n’est pas avec les incapables qui sont majoritaires dans le pays qu’on va pouvoir aider nos communes. » La foule conquise applaudit à tout rompre. Le député de la 2e circonscription du Nord termine par un coup du sombrero en hommage à la star de la soirée. Malheureusement dans un style proche d’une blague Carambar : « Je trouve que je ne fais pas le poids, et c’est normal puisque Julien Poix est là. Il faut voter pour lui maintenant ! »
Au tour d’Adrien Quatennens d’entrer en jeu. L’autre député LFI du Nord fait aussitôt admirer sa maitrise du une deux avec son collègue : « L’Assemblée nationale a été touchée par le coronavirus. Nous avons donc des précautions d’usage à prendre avec Ugo. Rassurez‐vous : depuis la semaine dernière, deux fois par jour, nous prenons notre température et nous ne faisons jamais 49–3 ».
La mi‐temps est sifflée. Les comédiens du PAP’40 font encore monter l’ambiance. Le show se conclut par les résultats d’élections municipales fictives et la victoire de, ô surprise, Julien Poix ! Comme pour mieux oublier que les derniers sondages n’accordent qu’entre 7 et 9 % au candidat LFI. Les « on a gagné » reprennent de plus belle. Instant idéal pour la prise de parole d’un candidat insoumis qui s’imagine déjà titulaire sous le beffroi. « Ce soir, c’est le premier conseil municipal de ma mandature », assure‐t‐il.
La tête de liste prend le temps de rappeler le projet du collectif Décidez pour Lille. Mais il n’oublie pas de tacler durement ses adversaires. Les deux pieds très décollés, il assène d’abord un coup au menton à Martine Aubry, accusée d’avoir « laissé un testament de béton et de pollution ». Mais c’est surtout Violette Spillebout, « la perdante », qui concentre toutes ses actions. Il se lance avec véhémence dans une diatribe contre la « candidate de la violence : la violence des riches, la violence de la matraque, la violence de ceux qui se font de l’argent sur les précaires de notre pays, sur les retraités, sur les étudiants ! » Manifestement, le propos fait mouche. Le candidat Daubresse, à côté, est à peine éclaboussé ; les Verts, presque totalement épargnés.
La fin du match approche. Dans le temps additionnel, trois de ses adjointes rentrent sur la pelouse. La pression redescend de quelques crans quand elles présentent « les délibérations » sur trois priorités du collectif. Adria Madelin présente celle sur le logement (plus de logements sociaux, moins d’insalubrité, etc.), Fanny Jouan défend le zéro construction à Saint‐Sauveur et Élodie Cloez termine sur la gratuité de la cantine et des transports en commun. Le public lève les mains pour adopter ces mesures à l’unanimité.
Les tacles
Jouer de manière agressive. Être dur sur l’homme ou la femme. Les consignes étaient claires ce soir. Chaque joueur y est allé de son tacle. « Nous voulons réduire à néant le score de Violette Spillebout, de LREM, qui se traduit par la retraite en moins. Ce mois‐ci, LREM doit devenir synonyme de La Raclée En Mars ! », exulte le député Quatennens. Martine Aubry et les Verts en prennent quand même pour leur grade : « Que n’a‑t-elle su faire en 18 années qu’elle pourrait faire en 6 années de plus ? Que n’ont pas su faire les écologistes à ses côtés en 18 années, qu’ils pourraient faire en 6 années de plus ? ». Julien Poix profite de l’absence d’arbitre ce soir pour faucher définitivement la meneuse de la liste LREM. « Puisqu’il est d’usage dans les soirées électorales de saluer les perdants, je vais dire un mot à Violette Spillebout. Elle va retourner à ses études en mars puisque les Lillois ne veulent pas de La République en Marche. Ils ne veulent pas de matraqueurs, d’éborgneurs dans leurs rues. »
L’Après-match
L’ensemble de l’équipe descend sur la pelouse du stade et entame son hymne : « On est là, on est là, même si Macron ne veut pas, nous on est là ! » Le concert du groupe de rock lillois « The Liquidators » peut commencer.
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