« Ce serait presque criminel de ne rien faire », lance Aurélie. Cette cadre dans les ressources humaines de 45 ans héberge depuis avril Ibrahim, 16 ans, dans sa maison de Trentemoult, à Rezé (Loire‐Atlantique). Ruelles décorées par des artistes, façades multicolores et fraîchement rénovées, bars et restaurants en bord de Loire… dans cet ancien village de pêcheurs volontiers décrit comme un repaire de « bobos », plus d’une dizaine d’habitants ont, comme elle, décidé d’ouvrir leur porte à de jeunes migrants. Agés de 16 à 18 ans, issus majoritairement d’Afrique de l’Ouest, ils ne bénéficient d’aucune prise en charge des pouvoirs publics, qui n’ont pas reconnu leur statut de mineurs non accompagnés (MNA), la nouvelle appellation officielle des mineurs étrangers isolés. Pour leur éviter les affres de la rue, ces bénévoles les accueillent à temps plein ou partagé, en fonction de leurs disponibilités. Ibrahim vit ainsi chez Aurélie une semaine par mois, en alternance avec trois autres familles. « Je trouvais cette solution plus souple pour notre équilibre familial, confie cette mère de trois enfants. On a presque l’impression d’avoir un enfant en garde partagée ! »
Aurélie et son mari, enseignant, font partie des 175 foyers du collectif des hébergeurs solidaires. Depuis six mois, ces derniers ont déjà mis à l’abri 58 jeunes migrants à Nantes et ses alentours. « Mais la liste d’attente s’allonge, avec 37 jeunes sans solution, et ce n’est pas prêt de s’arrêter », prévient la journaliste Dominique Perez, l’une des trois coordinatrices de ce mouvement citoyen. Celui‐ci est né en février dernier dans le sillage d’un appel à l’aide du collectif des mineurs isolés (MIE) de Nantes, débordé par l’afflux de jeunes sans toit. Il réunit principalement des associations d’aide aux migrants (Cimade, Gasprom, Médecins du Monde…) et ne cesse depuis deux ans de dénoncer la situation des mineurs non …