Les migrants qui tentent coûte que coûte de rejoindre l’Angleterre, ce drame humain dure depuis plus de vingt ans à Calais et sur la Côte d’Opale. En 2022, plus de 45 000 exilés ont risqué la traversée de la Manche, 31 d’entre eux sont décédés. Depuis 2018 et les premiers passages par la mer, le nombre de tentatives n’a cessé d’augmenter (on dénombrait un peu moins de 30 000 traversées en 2021). Le business des passeurs est désormais très bien rodé.
Dans « Les plages de l’embarquement » (Editions Les Arènes), résultat d’une enquête en immersion de sept ans, le journaliste Julien Goudichaud évoque une mafia aux méthodes très sophistiquées. Au cours de l’entretien qu’il a accordé à Mediacités, ce journaliste de 37 ans – qui collabore notamment avec France 2, Arte et la BBC – raconte aussi toute l’inventivité déployée par les migrants pour rejoindre l’Angleterre et se confie sur les coulisses de cette enquête hors normes qui l’a mené, lui aussi, à embarquer à bord d’un bateau de fortune en direction de Douvres.
Dans votre livre, vous détaillez les différentes techniques utilisées par les migrants pour tenter de rallier l’Angleterre. L’une d’elle est particulièrement dangereuse : s’accrocher sur un train en marche alors qu’il décélère avant de s’engager dans le tunnel sous la Manche…
En arrivant à Calais, je pensais innocemment que les migrants montaient dans des camions à l’arrêt sur des parkings. Alors, quand j’ai découvert ça, j’ai halluciné. Il faut ajouter qu’avant de pouvoir accéder à ce train en marche, ils doivent franchir plusieurs lignes de grillages et de barbelés, des barrières de près de quatre mètres de haut. Une fois au bord des rails, les migrants ciblent les trains de marchandises dans lesquels il y a des camions. Ils courent et tentent de s’accrocher… Mais il arrive souvent que le train les percute, qu’ils tombent et se blessent parfois très sévèrement. À l …