« J’espère que tu passes de bonnes vacances d’été » ; « Bonne année à vous et à vos proches, santé et bonheur » ; « Je me réjouis de vous lire bientôt » : ces extraits – traduits de l’allemand et de l’anglais – ne proviennent pas de la correspondance épistolaire entre deux amis, mais d’échanges entre des lobbyistes du groupe Airbus et des membres de la Commission européenne.
Mediacités a découvert ces échanges d’amabilités en épluchant les courriels préparatoires et comptes‐rendus de plus d’une vingtaine de réunions entre le législateur européen et les lobbyistes d’Airbus. Au‐delà de leur ton amical, ces documents permettent de mieux comprendre la stratégie d’influence de l’entreprise toulousaine sur un sujet central pour le groupe aéronautique : le climat.
Entre 2019 et 2024, Airbus s’est attelé à influencer la Commission sur deux dossiers clés : la taxonomie verte et la réglementation européenne sur les matières premières critiques.
S’incruster dans la taxonomie verte
« La taxonomie verte est probablement le dossier le plus important sur lequel Airbus a travaillé au cours de ce mandat », explique Jo Dardenne, directrice aviation à Transport&Environment (T&E), un collectif européen regroupant une cinquantaine d’ONG actives sur les questions de transport et d’environnement.
Sous ce nom savant de « taxonomie verte », se cache l’une des pierres angulaires de la stratégie climatique de l’Union européenne. Adopté en 2020, ce système de classification désigne certaines activités comme prioritaires pour réaliser la transition écologique, comme la foresterie, le stockage de l’hydrogène ou encore le transport ferroviaire (voir la liste complète page 12 de ce document). L’obtention de ce « tampon vert » européen permet aux entreprises des secteurs concernés d’attirer des investisseurs privés soucieux de préserver le climat. L’enjeu est donc de taille.
Initialement, cette taxonomie verte ne s’appliquait pas à l’aviation, car la Commission estimait qu’une expertise complémentaire était nécessaire concernant ce secteur …