Hauts‐de‐France : les lycées publics, premières victimes des mesures d’économies de la Région

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Par Eden Sakhi-Momen

Alors que plusieurs collectivités locales ont déjà annoncé des coupes budgétaires conséquentes, la région Hauts-de-France a décidé de décaler l’examen du budget 2025 d’un trimestre en raison d’un contexte national “difficile et imprévisible”. Seule une baisse des dotations aux lycées publics a pour l’instant été actée.

C’est une situation inédite au Conseil Régional des Hauts‐de‐France. Lors de l’assemblée plénière de décembre, les conseillers régionaux n’ont pas voté le traditionnel budget pour l’année à venir, préférant le décaler au mois de mars. Ils ont adopté un budget modificatif pour 2024, permettant d’assurer « la continuité des services publics », comme la circulation des TER, au premier trimestre 2025. « C’est notre loi spéciale à nous », a précisé pour l’exécutif régional, l’élu (UDI) Jean‐Paul Fontaine, en revenant sur l’impossibilité d’adopter un budget dans un contexte national « difficile et imprévisible ».

Interrogé de longue date par les oppositions sur les coupes budgétaires qui pourraient être décidées pour 2025, l’exécutif régional a une nouvelle fois botté en touche. Si le président Xavier Bertrand a déjà promis de ne pas augmenter la taxe sur les cartes grises, seul levier fiscal dont dispose la région, il se refuse toujours à donner ses grandes orientations budgétaires, argumentant sur l’incertitude et le manque de prévisibilité du budget de l’Etat, dont dépend étroitement celui de la région. Un silence qui tranche avec la communication d’autres régions, comme dans les Pays de la Loire, où la présidente Christelle Morançais, assume de chercher à économiser 100 millions d’euros.

Une baisse de 12 % de la dotation pour les lycées publics

Seul sujet sur lequel la région Hauts‐de‐France s’est déjà positionnée : la baisse de la dotation globale de fonctionnement des lycées publics. Elle devrait diminuer de 12 %, passant de 102 à 90 millions d’euros. Une situation que dénoncent les enseignants de nombreux lycées de la région depuis plusieurs semaines.

Le personnel du lycée Faidherbe de Lille s’était donné rendez‐vous en marge du conseil régional pour faire entendre son opposition. Selon les syndicats de l’établissement, avec un budget divisé par deux en deux ans, et après avoir épuisé le fonds de roulement, il pourrait manquer près de 500 000 euros pour assurer son fonctionnement l’an prochain. Élèves et professeurs pointent déjà un chauffage intermittent et des murs tâchés de moisissures.

Le conseil départemental a effectué un choix similaire au niveau des collèges dont il a la charge. La majorité de droite du président Christian Poiret a décidé d’économiser 12,5 millions d’euros sur les crédits accordés aux établissements du secondaire. Pour justifier ces coupes drastiques, les deux collectivités mettent en avant la baisse des coûts de l’énergie. La flambée des prix du gaz et de l’électricité avait engendré un bond des dotations en 2022.

Un choix différent pour les lycées privés… pour l’instant

L’exécutif régional déplore aussi le manque d’accompagnement de l’Etat, censé prendre en charge le volet pédagogique des dépenses : « Nous n’abandonnons pas les lycées mais il s’agit de rappeler que les compétences de la région sont sur le fonctionnement et l’entretien du bâti. Nous n’avons pas à financer le pédagogique et les déplacements [en voyage scolaire par exemple] », déplore Jean‐Paul Fontaine, pour la majorité du conseil régional. Un argument réfuté par l’opposition.

L’écologiste Yannick Brohard pointe ainsi le fait qu’ »il n’est écrit nulle part que la dotation globale de fonctionnement ne doit pas financer le pédagogique », la ventilation des crédits revenant aux chefs d’établissement. Sur le site de la région, on peut d’ailleurs lire que « la dotation globale de fonctionnement élaborée par la Région Hauts‐de‐France concerne la viabilisation, l’entretien et la maintenance », mais aussi « le fonctionnement administratif et pédagogique ».

De leur côté, les conseillers insoumis Elodie Cloez et Benoît Tirmarche dénoncent l’absence d’annonce similaire concernant les lycées privés, qui ont vu l’examen de leur dotation repoussée à plus tard, en même temps que celui du budget. « Ce choix traduit une politique injuste et dangereuse qui privilégie les intérêts d’un système particulier au détriment du service public [alors] que notre région connaît des écarts de performance scolaire parmi les plus élevés du pays », fustige Benoît Tirmarche.

Interpellé à de nombreuses reprises sur la question de cette éventuelle inégalité, le vice‐président chargé des lycées Laurent Rigaud a longtemps évité de répondre. « Le système éducatif est caractérisé dans la région par une présence importante de l’enseignement privé, a‑t‐il simplement fini par indiquer. Cette situation relève de l’histoire. C’est donc une partie de notre jeunesse qui est concernée. » La majorité a clôt le débat en rejetant en bloc les amendements déposés par l’opposition, proposant d’appliquer aux budgets des élus une baisse similaire de 12 % pour faire des économies.

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