Olivier Sadran, le “centimier” : enquête dans l’arrière‐cuisine de Newrest

De ses débuts modestes à la constitution d'une multinationale de la restauration collective, en passant par le TFC, Olivier Sadran a suivi une recette simple pour réussir : économiser le moindre centime. Efficace sur le plan financier, cette rigueur se heurte aux revendications de ses salariés... et va parfois aussi à l'encontre de leur sécurité. [1/3]

Newrest
Illustration Mediacités

Dans le jargon de la restauration collective, on les appelle les “centimiers”. “Ils vont rogner sur tout. Quelques centimes sur un repas, quand on parle en milliers ou centaines de milliers, cela fait des grosses sommes à la fin”, explique Claire Cosson, rédactrice en chef en charge du secteur au sein du magazine spécialisé Zepro restauration.

Le surnom va comme un gant au Toulousain Olivier Sadran, tant il correspond à l’archétype du patron chassant les coûts pour augmenter les marges de son entreprise. À travers le groupe Newrest, il règne aujourd’hui sur un empire qui a généré un chiffre d’affaires de 2,5 milliards d’euros et dégagé 234 millions d’euros de bénéfice avant intérêts et impôts, en 2024.

Cette propension à ne pas gaspiller le moindre euro pourrait prendre racine dans l’enfance de l’entrepreneur, lors de laquelle il était loin de vivre dans l’opulence. 
Des débuts difficiles…
Avant de mettre un terme à nos échanges dès que nos questions ont commencé à le chatouiller sur le rôle du Luxembourg dans la structuration financière de son groupe (voir En Coulisses), le chef d’entreprise s’est livré à Mediacités sur ses premiers pas dans la vie. Une prise de parole rare pour cet entrepreneur à succès qui, tout au long de son parcours, a cultivé la discrétion, surtout lorsque les questions touchaient à sa vie privée.

“Je suis né à Colomiers, avec une éducation dans le sport qui était assez stricte, raconte‐t‐il. J’étais assez turbulent à l’école. Et puis à 14–15 ans, mes parents se sont séparés. La séparation a été assez compliquée, au point qu’un juge m’a autorisé â être émancipé vers 16 ans. C’est à ce moment‐là que je suis allé vivre en cité (dans le quartier du Seycheron à Colomiers, NDLR), tout seul, et avec peu, voire pas de moyens. Cela a été intense et une excellente expérience jusqu’à mes 19–20 ans, et aussi un excellent complément à mon éducation initiale.” 

Si ces souvenirs d’une jeunesse âpre renvoient à l’image d’un battant, ils restent difficiles à corroborer. Mais les conditions de vie modestes d’Olivier Sadran avant sa majorité ont pu jouer un rôle important dans ses choix stratégiques pour son entreprise par la suite. Pour subvenir à ses besoins, l’étudiant d’alors raconte avoir travaillé l’été en tant qu’intérimaire sur des chantiers du BTP. C’est à ce moment‐là qu’il aurait eu l’idée de se lancer dans la restauration collective, en voyant les ouvriers apporter leur propre nourriture sur leur lieu de travail. 
… Mais couronnés de succès
En 1990, il se lance dans la restauration collective en créant, à 20 ans seulement, Corest, sa …

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Publié le

Temps de lecture : 9 minutes

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Par Dorian Cabrol et Leopold Salzenstein