La rumeur courait depuis des mois et c’est désormais officiel : Martine Aubry démissionne de son poste de maire de Lille. Mardi après‐midi, un email sibyllin annonçait aux journalistes la tenue d’une conférence de presse « au cours de laquelle [Martine Aubry] fera un point sur les politiques municipales, évoquera ses projets et l’avenir, et répondra aux questions sur l’actualité ». Jeudi, aux environs de 11 heures, la chose était officielle : elle cédera à la mi‐mars le fauteuil qu’elle occupait depuis 2001 et adoube son premier adjoint, Arnaud Deslandes, pour la remplacer.
Retrouvez le déroulé complet de la conférence de presse de Martine Aubry :
Convoqués à la gare Saint‐Sauveur, jeudi 6 mars, les journalistes entrent dans la salle à « 10h15 tapantes », indique notre journaliste présent sur place.
10h30 :
La maire de Lille commence par dresser le bilan de ses grandes réalisations. Pendant environ un quart d’heure, elle évoque la transformation de Lille Sud, l’aménagement des rives de la haute Deûle (Euratech), de la friche Fives Cail, etc. « On a fait tout cela tout en gérant bien la ville, souligne‐t‐elle. Pas d’endettement excessif, pas d’augmentation de la taxe d’habitation. »
Elle rend un hommage appuyé à son ancienne première adjointe à la transition écologique, Audrey Linkenheld, qui s’est auparavant longtemps occupé du logement : « Je voudrais remercier Audrey qui a été à l’origine de deux politiques majeures : l’accession sociale à la propriété (BRS) et la règle des trois tiers (soit la part de logements sociaux dans les programmes de logement) ». Elle la remercie également d’avoir mis sur pied le programme « Lille bas carbone ».
Au passage, la future ex‐maire de Lille donne en revanche un petit coup de griffe aux Verts à propos du dossier de la friche Saint Sauveur : « Certains nous ont fait perdre 10 ans dans ce projet qui, je l’espère, va sortir ».
Fin du suspens : Martine Aubry démissionne
10h43 :
L’occupante du Beffroi depuis 24 ans fait durer le suspens. Elle reprend son bilan alors qu’elle avait annoncée qu’elle s’arrêtait… Elle défend notamment sa politique de transition énergétique. « J’ai beaucoup entendu dire qu’on faisait du greenwashing, qu’on avait découvert ça tardivement, c’est faux ». A Mediacités, on se sent un peu visés.
« La première priorité pour nous, c’est l’éducation, premier budget de la ville, et une promesse républicaine », souligne encore la maire.
10h45 :
Qui a dit que Martine Aubry n’avait pas d’humour ? En parlant des activités seniors, elle se fend d’une petite blague : « C’est là que je serai bientôt. On m’a déjà proposé scrabble et chorale chanson française ».
La publication d’un article du journal Le Monde officialise le départ de Martine Aubry : « Après trente ans comme élue et vingt‐quatre ans à la tête de la préfecture du Nord, la maire socialiste annonce, dans un entretien au « Monde », qu’elle cessera ses fonctions à la mi‐mars, à un an des élections municipales. »
11h11 :
On entre dans le vif du sujet : « Je vais en arriver a ce qui vous intéresse vraiment »
« Avant d’annoncer des décisions importantes pour moi et pour Lille, j’ai eu au cœur de vous présenter, ma vision, mes résultats. J’ai beaucoup entendu et lu “elle n’a pas préparé sa succession. Elle va partir avant les JO, après les JO, après la braderie…” Je me suis toujours dit : “il faudrait réussir à partir un an avant les municipales”. Je m’étais donné des conditions :
1/ Que tout ce que avions promis aux Lillois soit réalisé ou engagé.
2/ Avoir une belle équipe : “Je suis heureuse qu’il y ait beaucoup de jeunes à des hauts niveaux. Préparer sa succession, ce n’est pas seulement choisir un maire mais choisir une équipe.”
3/ Décider du processus de succession »
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« Je souhaite qu’Arnaud Deslandes soit élu maire »
11h15 :
Très émue, elle rend un nouvel hommage à Audrey Linkenheld.
« Nous avons aujourd’hui – et c’est très important pour Lille – un député et une sénatrice. Ils représentent Lille au national, affirme Martine Aubry. Elle [Audrey Linkenheld] pourrait être un maire de haut niveau mais nous avons besoin d’elle au Sénat. Nous avons besoin d’elle pour le renouveau du parti socialiste et de la gauche. Dans ces discussions, Audrey a montré un sens du collectif et un sens des responsabilités ».
Marine Aubry s’arrête alors et pleure : « Je veux dire tellement dire qu’Audrey compte pour moi », indique‐t‐elle, des sanglots dans la voix. « Ce n’est pas mon départ qui m’émeut, ajoute‐t‐elle. C’est simplement l’affection que je porte à ceux qui m’entourent »
Elle se tourne maintenant vers Arnaud Deslandes, son directeur de cabinet de 2013 à 2020 et désormais son premier adjoint. C’est lui qui, sauf surprise, lui succèdera dans moins d’un mois en tant que maire de Lille. Un véritable passage de flambeau qui aura lieu à l’occasion d’un conseil municipal extraordinaire le 21 mars. « Je souhaite qu’Arnaud Deslandes soit élu maire à ce moment là », ponctue Martine Aubry.
11h19 :
Elle annonce se retirer de toutes ses fonctions à Lille (MEL, SPl, etc.). Mais précise néanmoins ne pas prendre sa retraite politique. Elle affirme notamment vouloir travailler au sein du parti socialiste, dont elle fut première secrétaire de novembre 2008 à septembre 2012. « Je veux que le PS retrouve une voix auprès des Français et soit capable de diriger le pays. Je m’exprimerai à chaque fois que je penserai que cela sera utile ».
11h21 :
« Je ne quitte pas Lille, ça ne va pas vous étonner. J’aime trop cette ville, les Lilloises et les Lillois » reprend‐elle.
Malgré l’émotion de Martine Aubry, le passage de témoin s’est effectué sans effusion ni contacts physiques. Arnaud Deslandes ne s’est même pas levé.
« Je pense qu’il faut laisser la place à une nouvelle génération »
11h26 :
Un petit mot aux journalistes avant de leur passer la parole pour les questions : « Même si parfois nos rapports n’ont pas été totalement simples, je suis inquiète de la liberté de la presse dans ce pays ».
Elle confirme qu’elle démissionnera bien de toutes ses fonctions : « Je ne vais pas être derrière eux [la nouvelle équipe, NDLR]. Ils sont bons, ils sont jeunes, ils ont de bonnes idées. Je pense qu’il faut laisser la place à une nouvelle génération, et quand on le fait, il faut le faire en entier ». Elle répète également ne pas prendre sa retraite politique. « Je veux participer à ce renouveau des idées de gauche. Comme je n’ai pas d’ambitions personnelles pour moi, je pense que je serai mieux entendue. »
Elle conteste les reproches qui lui ont été faits autour de sa possible succession à la mairie de Lille : « On a fait que dire “Elle [ne l’a] pas préparée.” Bah si ! »
11h37 :
Interrogée sur ses regrets après vingt‐quatre années passées au beffroi :
– « 1er regret : que nous n’ayons pas obtenu les policiers nationaux dont nous avons besoin. » Elle évoque le trafic de drogue. « C’est régalien, ça revient à la police nationale. » Je n’ai pas convaincu les ministres de l’Intérieur ».
– « 2e regret : la politique du logement. Nous aurions souhaité aller plus loin. Il n’y a plus de politique nationale du logement. Il y a encore trop de mal logés dans notre pays et dans notre ville, malgré nos efforts ».
– 3e regret : « que nous n’ayons pas fait Saint Sauveur. Un quartier qui répond à tout ce dont on a besoin aujourd’hui. Avoir perdu 10 ans et la piscine olympique. »
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« La solidarité, c’est l’ADN des Lillois et c’est le nôtre »
11h41 :
Nouvelle attaque contre les Verts :
« J’ai le regret de dire que les Verts étaient aux manettes pendant les précédents mandats. »
11h43 :
« La solidarité, c’est l’ADN des Lillois et c’est le nôtre. L’ADN code Lillois c’est d’être près des autres. On vit côte à côte. Les grandes fêtes que nous faisons, tout le monde se mélange. »
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11h50 :
Sur l’absence à cette conférence de presse de Roger Vicot, ancien maire de la commune associée de Lomme et candidat à la mairie de Lille :
« Roger Vicot est un bon député. Il a été élu il y a six mois. Si j’étais lui, je resterai à l’Assemblée nationale. Il est utile », indique Martine Aubry. Elle lui reproche toujours l’annonce de sa candidature : « Une démarche individuelle solitaire, contraire à l’équipe ».
Concernant la primaire socialiste prévue le 6 novembre, elle se veut rassurante. « Je n’ai jamais vu quelqu’un dans la ville de Lille qui ne respecte pas les statuts du parti socialiste. Si Roger est candidat, il y aura une primaire. Je pense néanmoins que, dans cette période, on devrait être rassemblés. »
11h53 :
Arnaud Deslandes, qui n’a quasiment rien dit jusqu’ici, s’exprime enfin : « Prendre la suite de Martine, ça incite beaucoup à l’humilité. »
12 heures :
La conférence de presse s’achève. C’est bel et bien officiel. Après 24 années passées à la tête de Lille, Martine Aubry passe la main.
Presque concomitamment, un message est publié sur le compte X de la maire de Lille :
Être Maire de Lille ces 24 dernières années a été un bonheur. Merci pour notre relation simple, confiante et chaleureuse. Merci pour votre solidarité. Restez attentifs aux autres, ne changez pas !pic.twitter.com/BGn9sELwPw
— Martine Aubry (@MartineAubry) March 6, 2025
Merci d’avoir suivi cette conférence de presse historique avec Mediacités. Plus d’informations et d’articles sur la démission de Martine Aubry à venir dans les heures et les jours qui suivent.
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