Battes de baseball, clubs de golf, barres de fer, couteaux, sabres japonais… Le 30 août 2016, des bandes rivales s’affrontent à l’arme blanche rue Jules‐Guesde, en plein cœur de Wazemmes. Bilan de la rixe : quelques pare‐brises fracassés, une poignée d’arrestations et une sérieuse frayeur pour les passants et les commerçants. Si ce déchaînement de violence étonne, jusqu’à faire les gros titres de la presse, il était pourtant largement prévisible. Dans ce secteur, le climat s’est tellement dégradé depuis quelques années que la violence est devenue (presque) banale. Un an et demi plus tôt, en avril 2015, par exemple, un adolescent était arrêté en flagrant délit de vol de chaîne de cou. Quelques mois auparavant, c’était un habitant du quartier qui se faisait agresser, un dimanche matin, pour un simple refus de cigarette. Des faits divers comme ceux‐là, La Voix du Nord en rapporte presque chaque semaine dans cette partie de Wazemmes en proie à la délinquance et au trafic de drogues.
« Je suis né dans le quartier, je n’ai peur de rien, mais j’éprouve tout de même une certaine appréhension à m’y balader. Il était temps que l’on s’en aille : la situation s’est encore un peu plus dégradée depuis que nous sommes partis », déplore Thierry Wainstein, le propriétaire des chaussures Félix, qui a quitté la rue en mars 2016. Sans regrets. Les clients ne venaient plus, l’atmosphère était devenue trop pesante. Si le départ de ce commerçant historique est symbolique, il est loin d’être le premier. Droguistes, boulangers, électroménager, horloger, marchand de poissons rouges… autant de commerces qui ont petit à petit mis la clé sous la porte. Mondialisation, loyers en hausse, difficultés du commerce de proximité, explosions de la vente sur Internet… Comme ailleurs, tous ces bouleversements ont eu raison de ce lieu de vie. Mais il n’y a pas que ça.
« Lille, tu perds Wazemmes. Tu perds ton âme ! »
Si certaines façades sont murées, certains rideaux de fer tirés pour de bon, ceux qui gardent leur boutique ouverte le font parfois à contrecœur. « Notre restaurant est en vente depuis un an et demi. Nous n’avons reçu qu’une seule visite, regrette un commerçant de la rue. On travaille à perte. Parfois le samedi soir, nous ne servons même pas un couvert. » Son quotidien est fait de vitrines cassées, d’intimidation et de peur du cambriolage. « Mon chiffre d’affaires a baissé de 60%. Cela fait vingt‐deux ans que je suis ici, avant c’était un plaisir, ce n’est plus le cas. » Même les habitués n’osent plus venir.
Pour les riverains comme pour les commerçants, le ras‐le‐bol ne date donc pas d’hier. Et beaucoup parlent de sentiment d’abandon. Ce n’est pourtant pas faute de se mobiliser. En octobre 2014, déjà, une banderole accrochée à l …