Il défie Casino : Thierry Gautier, touché, mais pas coulé

Ce gérant d’une supérette de Roubaix, âgé de 37 ans, dénonce depuis de longues années les pratiques du géant français de la grande distribution. Le Nordiste, qui accuse le groupe de travail dissimulé, vient d’être renvoyé sans préavis ni indemnités. Le bras de fer, pour autant, est loin d’être terminé.

Thierry Gautier Roubaix
Thierry Gautier, qui gérait une supérette Casino à Roubaix, a été remercié 1er décembre. Photo : Sébastien Jarry / Andia

Mardi 1er décembre 2020, 8 heures du matin, Roubaix. Le jour tarde encore à se lever sur la ville aux mille cheminées ; le temps déjà promet d’être mauvais. Thierry Gautier vient d’ouvrir les portes de son magasin, un Casino shop de 400 mètres carrés qu’il tient avec son épouse, Séverine, depuis 2014, quand il les voit arriver. Trois hommes en costumes sombres, sous des vestes trois quart : le directeur commercial de Casino, le responsable des ressources humaines et l’huissier. Ce dernier lui tend un courrier, sans prendre le temps de le saluer.

« Pendant que je lisais, ils sont restés debout devant moi, les bras croisés. La lettre indiquait que ma femme et moi étions licenciés sur le champ. Ils ont refermé les portes, les volets, et appelé un serrurier. J’avais perdu mon grand‐père à 23h la veille – je n’avais pas dormi de la nuit. Je leur ai indiqué que je n’étais pas en pleine possession de mes moyens, ils ont seulement répondu : « désolés ». Quelques minutes plus tard, le couple de gérants choisi pour nous remplacer est arrivé, prêt à faire l’inventaire du stock. J’ai refusé de participer », raconte Thierry Gautier quelques jours après, regard bleu las mais menton volontaire, l’élocution calme et claire.

Motif du renvoi : des « manquements graves et répétés dans [la] gestion [du] magasin », indique le document officiel consulté par Mediacités. Le couple, affublé du statut hybride de « co‐gérants mandataires non salariés » – ni propriétaires du stock ni du fonds, ils sont rémunérés à la commission avec un seul contrat pour deux – est accusé de « ne pas respecter la procédure de déclaration et de dépôt de [leurs] recettes » ; Casino exige que celles‐ci soient communiquées tous les dix jours. « Ce n’est écrit nulle part dans notre contrat, qui prévoit que nous sommes libres et autonomes dans l’organisation du travail et sa gestion. Nous sommes censés être indépendants, donc on s’organise comme on l’entend », rétorque Thierry Gautier, qui n’a cessé de le répéter lors de l’entretien préalable à leur éviction, qui s’est tenu à Paris le 10 novembre dernier …

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Par Clémence de Blasi

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