Le pas‐de‐porte, ce dessous‐de‐table qui empoisonne l’agriculture nordiste

Dans le Nord Pas-de-Calais, une vieille tradition du monde agricole prévoit que le locataire entrant d’une terre verse une somme au sortant afin de pouvoir y accéder. Baptisé « pas-de-porte », ce droit d’entrée est illégal. Mais il prend de plus en plus d’ampleur avec la pression foncière.

Terres_Comines2
Un terrain agricole à Comines, dans la métropole lilloise. Photo : Simon Henry

« Bonjour. Je vous contacte car j’ai un projet d’exploitation agricole avec ma compagne. Nous avons trouvé un agriculteur qui cédera sa terre dans quelques mois. Un terrain de 20 hectares.
– Super, dans quel coin ?
– Dans la métropole lilloise. Exactement dans le périmètre que nous ciblions.
– Vous avez eu beaucoup de chance. C’est un secteur très prisé et la terre disponible y est rare. Que puis‐je faire pour vous ?
– Voilà, au moment où nous parlions chiffres, l’agriculteur nous a rétorqué : « comment s’arrange‐t‐on pour la reprise ? » Ce à quoi nous avons répondu : « comment ça ? »
– Oui, je vois, pas de panique. Le contraire m’aurait étonné. Je vais vous expliquer. La reprise, connue aussi sous les termes de pas‐de‐porte ou d’arrière‐fumure, est une particularité de Nord de la France. Une pratique illégale mais totalement ancrée dans le paysage agricole consistant à rétribuer le locataire cédant car il vous met à disposition de la terre qu’il a travaillée et améliorée estime‐t‐il. Pour le dire franchement, il s’agit de dessous‐de‐tables. Combien vous a‑t‐il demandé ?
– Des dessous‐de‐tables ? Vous plaisantez !? 10 000 euros l’hectare. Soit 200 000 euros !
– 10 000 euros… Et encore il aurait pu monter plus haut.…
– Vous pensez bien que nous n’avons pas les moyens. Croyez‐vous qu’il est possible de négocier ?
– Vous pouvez essayer mais très honnêtement, si vous ne versez pas le prix demandé, d’autres le feront à votre place. »

Le décor est planté. Bienvenue dans les coulisses de la location des terres agricoles dans le Nord Pas‐de‐Calais.

Ce dialogue est celui que j’ai eu avec un représentant local de CER France, un réseau d’experts-comptables très sollicité par les agriculteurs, en me mettant dans la peau d’un exploitant à la recherche d …

Nous vous offrons l’accès à cet article

Et à toutes nos enquêtes pendant deux jours  !
Oui, on est généreux 😉 Mais pensez aussi à vous abonner  !

En renseignant votre adresse, vous acceptez nos conditions générales d’utilisation.
Mediacités s’engage à ne pas céder votre adresse à des tiers. En cas d’échec, écrivez à contact@mediacites.fr
  • J’accède aux 4 éditions de Mediacités (Lille, Lyon, Nantes et Toulouse)
  • Je découvre un média 100 % indépendant, avec 0 % de publicité

Attention, journal en danger !

Depuis huit ans, Mediacités propose un journalisme d’investigation sur les pouvoirs locaux et ses enquêtes ont de l’impact dans les villes. Aujourd’hui notre existence est menacée.
Soutenez la rédaction, ses journalistes et la démocratie locale :

Je soutiens Mediacités

  • en vous abonnant (69 € par an ou 7,90 € par mois, résiliable à tout moment et facilement) pour lire toutes les enquêtes
  • en effectuant un don (défiscalisable à 66%) pour soutenir le travail et assurer la survie d’un journal local indépendant, sans pub et à impact.

Publié le

Modifié le

Temps de lecture : 7 minutes

Favorite

Par Simon Henry

Attention : journal en danger !
Soutenez Mediacités !

Depuis bientôt huit ans, notre journal d’investigation propose des enquêtes sur les pouvoirs locaux dans les grandes métropoles. À Lille, Lyon, Nantes et Toulouse, des dizaines de journalistes publient en toute indépendance des informations inédites qui nourrissent le débat public et produisent de l’impact.
Aujourd’hui, notre campagne de financement participatif a dépassé 75% de l’objectif. Aidez-nous à atteindre les 100% d'ici au 31 décembre !
On vous explique tout ici :

Comment soutenir Mediacités ?

D’ici au 31 décembre, chaque coup de pouce compte !

Ceci fermera dans 25 secondes