Hauts‐de‐France : mais où est donc passée la Troisième révolution industrielle ?

En 2013, l'ex-région Nord-Pas-de-Calais commandait pour 350 000 euros une feuille de route pour la transition vers une économie décarbonée au prospectiviste Jeremy Rifkin. Sept ans plus tard, le bilan s’avère très contestable et quelques voix n'hésitent pas à parler d'enfumage.

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Jeremy Rifkin à Lille en 2013 lors d'une conférence de presse sur la troisième révolution industrielle/ © Photo: Baziz Chibane/SIPA

« La révolution est comme une bicyclette : quand elle n’avance pas, elle tombe », disait Ernesto Che Guevara. Si la métaphore est exacte, la Troisième révolution industrielle (TRI) censée métamorphoser l’économie du Nord‐Pas‐de‐Calais ressemble fort à un vélo abandonné dans le fossé.

Tout avait pourtant bien commencé. En 2012, l’ex-région Nord‐Pas‐de‐Calais, tenue par une majorité de gauche PS‐EELV‐PCF, se met d’accord avec la Chambre régionale de commerce et d’industrie, dirigée par le chiraquien Philippe Vasseur, pour lancer un plan très ambitieux. Le prospectiviste américain Jeremy Rifkin a publié un ouvrage intitulé La Troisième Révolution industrielle, dont la traduction en français vient alors de sortir (Editions Les Liens qui libèrent). Rifkin dessine des perspectives enthousiasmantes (sans doute trop, voir notre encadré ci‐dessus) à base de réseaux intelligents et décentralisés, avec à la clé une envolée spectaculaire des énergies renouvelables, une baisse drastique des émissions de gaz à effet de serre, un décollage du véhicule électrique et un recul concomitant de la consommation de carburant.

Belle théorie. Elus et patrons réunis, les nordistes proposent à Jeremy Rifkin de passer à la pratique. Il accepte et rédige, moyennant 350 000 euros, un rapport de 324 pages. Baptisé le « Master Plan », il résonne comme une revanche sur le sort pour l’ex‐bassin industriel et minier. Rifkin tient la recette pour faire de la région Nord‐Pas de Calais « à l’horizon 2050, une des premières au monde à basculer complètement dans l’ère post‐carbone ». Audacieux, le visionnaire fixe même des points d’étapes intermédiaires pour 2020. Nous y sommes. Hélas, aucun de ces points ne sera atteint, sauf peut‐être par accident, la crise sanitaire ayant fortement impacté l’activité économique.
Tout faux dans les prévisions
La demande énergétique des transports, par exemple, devait baisser de 10% entre 2010 et 2020. Elle a été stable entre 2010 et 2019, à 2,7 millions de mètres cube de carburants vendus dans le Pas‐de‐Calais et le Nord, sous l’effet probable d’une augmentation modéré du parc et d’un léger progrès des motorisations. Il y aura sans doute un net recul de la consommation cette année, mais seulement en raison du confinement.

Le « Master Plan » prévoyait un « mix énergétique 100 % renouvelable » en 2050, avec dès 2020 un développement massif du petit éolien, de l’éolien off‐shore, ainsi que de l’éolien le long des routes et des voies de chemin de fer, pour limiter la consommation de foncier. Rien ne s’est passé comme prévu. Le renouvelable est passé de 4 % à 8 % dans le bilan des Hauts‐de‐France entre 2019 et 2020, ce qui est loin d’être ridicule, mais c’est grâce aux grandes fermes éoliennes, au bois et à la méthanisation.

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Par Erwan Seznec

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