Agressions sexuelles du « Picasso des églises » : le long silence des diocèses de Lyon et Grenoble

D’après nos informations, les autorités catholiques étaient alertées sur le passé pédocriminel de Louis Ribes depuis au moins cinq ans. L'ancien archevêque Philippe Barbarin lui-même avait échangé avec l'une de ses nombreuses victimes en 2017. Mais ce n’est qu’après la médiatisation d'un témoignage que les diocèses concernés ont soudainement décidé, à la mi-janvier, de retirer les œuvres de cet artiste-prêtre décédé.

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Le chemin de croix de l'église de Pomeys, dans les Monts du Lyonnais, décroché le 12 janvier dernier. Photo : Charles Deluermoz.

Ce mercredi 12 janvier 2022, une brume persistante enveloppe les Monts du Lyonnais. Mais dans le bourg assoupi de Pomeys, village du Rhône à la lisière de la Loire, la petite église Saint‐Martin semble gagnée par une agitation particulière. À l’intérieur, des membres de la commission d’Art sacré du diocèse de Lyon, surpris par la présence de Mediacités, s’activent pour décrocher les tableaux du chemin de croix. « Cela nous dépasse totalement », nous lance Violaine Savereux‐Courtin, responsable de la commission. Celle qui coordonne l’opération se refusera à tout autre commentaire.

Créations cubistes et bigarrées, les seize stations dépendues puis emballées dans du papier bulle sont signées « RIB ». Trois lettres qu’utilisait l’artiste et prêtre Louis Ribes pour marquer ses œuvres. Le lendemain, les diocèses de Lyon, Saint‐Etienne et Grenoble diffuseront un communiqué révélant que l’homme d’Église, mort à Vienne (Isère) en 1994, est accusé d’agressions sexuelles et de viols sur mineurs.

Combien de victimes Louis Ribes a‑t‐il laissées derrière lui ? Après l’affaire du père Preynat, après le rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise (Ciase) qui a conclu à la présence d’environ 3000 « pédocriminels » dans les rangs de l’institution catholique depuis les années 1950, et alors que Mediacités et Tribune de Lyon ont révélé vendredi dernier des accusations d’attouchements portées contre l’ancien supérieur des Chartreux, l’affaire du « Picasso des églises » – le surnom donné au père Ribes – ébranle de nouveau l’Église de France et l’archidiocèse de Lyon.

Les responsables religieux ont semblé cette fois‐ci prendre les devants en appelant les victimes à s’exprimer publiquement [lire plus bas]. Mais l’image est trompeuse. D’après notre enquête débutée en décembre dernier [lire l’encadré En coulisses], les diocèses de Grenoble‐Vienne et de Lyon ont tardé à réagir. Le cardinal Philippe Barbarin lui‐même avait échangé avec l’une des victimes en 2017.
Il gagnait la confiance des parents
Né en 1920 à Grammond, un village de la Loire, l’abbé Louis Ribes, prêtre séculier enseignant dans des séminaires de la région, s’était forgé la réputation d’un

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Par Charles Deluermoz

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