En Vendée, l’Ices forme les élites de la droite réac

Elus, professeurs, communicants, lobbyistes... Voilà vingt-sept ans que l’Institut catholique d’études supérieures forme l’élite vendéenne. Mais au-delà de ce « creuset local », l'université voulue par Philippe de Villiers est devenue la pouponnière de la droite catholique légitimiste française. Plongée dans les arcanes d'une école très singulière.

Ices1
Les locaux de l'ICES, Institut Catholique d'Enseignement Supérieur à La Roche-sur-Yon. / Photo: Andia

En ce matin du samedi 21 novembre 2015, tout le gratin vendéen a fait le déplacement. Des cols romains et des costumes‐cravates venus célébrer, en communion, les vingt‐cinq ans de l’Institut catholique d’études supérieures de La Roche‐sur‐Yon. Après les introductions successives de l’évêque de Luçon puis du président de l’Ices, c’est au tour de Chantal Delsol de prendre la parole : « Il n’y a pas d’université s’il n’y a pas le monde culturel qui est le nôtre. Il n’y a pas d’université sans notion de vérité ». Puis, l’historienne des idées politiques s’arrête un instant, et lance : « Le logos est seulement occidental. »

Peu connue du grand public, Chantal Delsol est une figure de la droite conservatrice, antilibérale, eurosceptique et catholique française. Cofondatrice, en 1992, de l’association pour la Fondation de service politique, un laboratoire d’idées néoconservateur, celle qui est aussi l’épouse de Charles Millon fait partie du comité de rédaction de L’Incorrect. Lancée le 7 septembre dernier par Charles Beigbeder et Laurent Meeschaert, tous deux membres de l’Avant-Garde, le club de réflexion de l’ancien ministre Charles Millon, cette revue se veut « une alliance politique, intellectuelle et culturelle » des « multiples maisons de la droite », de la plus classique jusqu’au Front National. Une « passerelle » qui valide, vingt‐cinq ans après, « l’intuition créatrice » de Philippe de Villiers lors de la création de cette université privée, un peu particulière.

L’intuition créatrice de Philippe de Villiers

« L’Ices vient de loin expliquait, l’ancien homme fort de la Vendée lors de la journée anniversaire. De cette idée de former des élites enracinées. A contre‐courant de la société nomade, volatile et consumériste. » L” « intuition » prend corps au mitan des années 1980. Dans une Vendée où « nous avions une culture de pénurie d’élites, il fallait permettre aux Vendéens d’étudier au pays pour travailler au pays, précisait Philippe de Villiers quelques jours plus tôt dans la presse. J’ai donc fait sur un plan académique ce que j’avais réalisé sur un plan culturel avec le Puy du Fou, à savoir une université d’excellence et un centre de recherche universitaire sur l’histoire de la Vendée. »

Le 16 juin 1990, l’Institut catholique d’études supérieures de La Roche‐sur‐Yon devient réalité. Pour le financer, celui qui occupe la tête du Département depuis l’automne 1988, a retourné en sa faveur un dossier laissé par son prédécesseur : la création de la Courtaisière, une antenne de l’Université – publique – de Nantes à La Roche‐sur‐Yon. « A ce moment‐là, j’ai eu l’idée d’aller voir Mgr Paty (ndlr : l’évêque de Luçon de l’époque) pour lui proposer une sorte d’académisme des fausses fenêtres », raconte Philippe de Villiers dans le livre anniversaire Ices, l’école universitaire. Un lieu, un esprit, un souffle. Le pacte envisagé est simple : contraint de financer une université publique, il propose parallèlement à l’évêque de Luçon « de financer à même hauteur, et dans les mêmes conditions de justice et d’équité, une université catholique ». Un deal à 2,8 millions d’euros annuels qui est toujours en vigueur, même si l’aide départementale a baissé de 130 000 euros en 2016 puis de 200 000 euros en 2017.

Un temps méfiant car « craignant le trop fort risque de récupération politique », comme l’ont raconté anonymement à Mediacités des membres du diocèse de Luçon, l’évêque commence par refuser avant de changer d’avis. Difficile de s’opposer à un tel projet dans « cette Vendée aux lèvres closes, scellée d’un signe de croix », comme aimait la décrire l’écrivain Jean Yole. « Face à cette alliance de circonstance …

Nous vous offrons l’accès à cet article

Et à toutes nos enquêtes pendant deux jours  !
Oui, on est généreux 😉 Mais pensez aussi à vous abonner  !

En renseignant votre adresse, vous acceptez nos conditions générales d’utilisation.
Mediacités s’engage à ne pas céder votre adresse à des tiers. En cas d’échec, écrivez à contact@mediacites.fr
  • J’accède aux 4 éditions de Mediacités (Lille, Lyon, Nantes et Toulouse)
  • Je découvre un média 100 % indépendant, avec 0 % de publicité

Attention, journal en danger !

Depuis huit ans, Mediacités propose un journalisme d’investigation sur les pouvoirs locaux et ses enquêtes ont de l’impact dans les villes. Aujourd’hui notre existence est menacée.
Soutenez la rédaction, ses journalistes et la démocratie locale :

Je soutiens Mediacités

  • en vous abonnant (69 € par an ou 7,90 € par mois, résiliable à tout moment et facilement) pour lire toutes les enquêtes
  • en effectuant un don (défiscalisable à 66%) pour soutenir le travail et assurer la survie d’un journal local indépendant, sans pub et à impact.

Publié le

Modifié le

Temps de lecture : 14 minutes

Favorite

Par Pierre-Yves Bulteau

Attention : journal en danger !
Soutenez Mediacités !

Depuis bientôt huit ans, notre journal d’investigation propose des enquêtes sur les pouvoirs locaux dans les grandes métropoles. À Lille, Lyon, Nantes et Toulouse, des dizaines de journalistes publient en toute indépendance des informations inédites qui nourrissent le débat public et produisent de l’impact.
Aujourd’hui, notre campagne de financement participatif a dépassé 75% de l’objectif. Aidez-nous à atteindre les 100% d'ici au 31 décembre !
On vous explique tout ici :

Comment soutenir Mediacités ?

D’ici au 31 décembre, chaque coup de pouce compte !

Ceci fermera dans 25 secondes