Attirant tous les regards, salué de toutes parts, l’aménagement de l’île de Nantes a fait l’unanimité pendant près de vingt ans. Mais voilà que depuis quelque temps le concert de louanges se fait nettement plus étouffé dans le petit monde de la fabrique de la ville. En cause : la dernière livraison de l’opération, l’écoquartier Prairie‐au‐Duc (3 000 habitants à terme), que les professionnels de la profession s’accordent à juger assez navrante. « C’est la catastrophe des trente prochaines années », prédit même un expert respecté de la place de Nantes.
Pour avoir passé toute ma jeunesse à Nantes, vu émerger les prémices du projet puis avoir travaillé vingt ans sur l’actualité des villes (lire En coulisses), je me souviens, marchant le long des quais de Loire, des propos d’un des promoteurs du quartier, alors que celui‐ci n’était encore qu’à l’état d’images de synthèse. « Prairie‐au‐Duc concentrera le meilleur du projet de l’île de Nantes : une situation idéale en belvédère de la Loire et de la ville, à quelques minutes à pied du centre historique et du tramway. Nos futurs résidents pourront même admirer le Grand Éléphant déambulant sous leurs fenêtres. » C’était en 2010 et, à priori, il n’y avait aucune raison d’en douter puisque jusqu’alors, l’île de Nantes frisait le sans‐faute. Pourtant, on aurait dû. Car comme chacun sait, un éléphant ça trompe énormément. Et les résidents en question ont, aujourd’hui, d’autres préoccupations qu’un pachyderme articulé. Comme, par exemple, ne pas oublier, chéri, de faire les courses en sortant du boulot, parce que les commerces se font plutôt rares dans le coin.