C’était un mardi matin. Le 9 octobre 2018, à Brain-sur‑l’Authion, à une quinzaine de kilomètres à l’est d’Angers, 61 personnes commencent à avoir les yeux qui piquent. Puis ils suffoquent, avec une affreuse sensation d’irritation dans la gorge, un peu comme une attaque aux gaz lacrymogènes. 17 d’entre elles sont conduites au CHU d’Angers.
La cause de ces intoxications ? Le métam‐sodium, un produit phytosanitaire extrêmement volatile servant à désinfecter les sols avant l’implantation de culture de mâche. Trois jours plus tard, un nouvel épisode survient sur la même commune, à proximité d’un lycée. Les autorités décident alors d’interdire définitivement ce produit qui bénéficiait depuis neuf ans d’un régime dérogatoire.
La société Primaloire, basée à Saint‐Julien‐de‐Concelles, qui exploitait ces terres angevines, comparait ce lundi 22 mai devant le tribunal correctionnel d’Angers pour ces faits d’intoxications. Face à elle, 76 victimes d’intoxication, mais aussi France Nature Environnement Anjou (FNE). L’association, qui espère faire de ce procès une tribune, reproche notamment au maraîchage industriel, très tourné vers l’export, de travailler en monoculture avec utilisation intensive d’engrais, de sable et d’eau.
De plus en plus d’hectares
L’interdiction du métam‐sodium, qualifiée de « décision couperet » à l’époque par la Fédération des maraîchers nantais, provoquait les plus vives inquiétudes au sein de la filière. Sans solutions désormais pour préparer leurs sols, les maraîchers allaient‐ils s’en sortir ? « On était la première région de production d’Europe et on s’est fait doubler par les Italiens qui peuvent encore utiliser ce produit », s’étrangle aujourd’hui son directeur Emmanuel Torlasco.
Selon le Comité départemental de développement légumier (CDDM), l’institut technique de la filière, la production de mâche nantaise aurait diminué de 10% depuis 2019. Parallèlement, les surfaces de maraîchage ont progressé : de 24% en Loire‐Atlantique entre 2010 et 2021, selon les données du ministère de l’Agriculture ; et de 17% en Maine‐et‐Loire. L’une des explications à cette progression tient précisément à l’arrêt du métam‐sodium.
« Pour gérer l’enherbement, l’une des solutions consiste à désintensifier les cultures, c’est-à-dire ne produire que deux ou trois cultures de mâche au lieu de quatre sur la même parcelle au cours d’une année, explique Brigitte Pelletier, directrice technique du CDDM. Cela conduit …