Arnaud‐Bernard, dernières clopes avant l’embourgeoisement

Connu pour le trafic de cigarettes, abonné à la rubrique "faits divers" des journaux, Arnaud-Bernard est aussi un laboratoire du renouveau civique. Sous l’effet du réaménagement impulsé par la mairie, ce quartier populaire emblématique de Toulouse connaît une mutation accélérée.

Place Arnaud Bernard
Sur la Place Arnaud Bernard, à Toulouse, le 26 mai 2018. Photo : Fred Scheiber.

D’un geste vif, le paquet de Philip Morris jaune est extrait du petit sac en bandoulière et, pour 5 euros, change de main. Le vendeur est jeune, l’acheteur un peu moins. C’est le milieu de l’après‐midi et la scène se déroule juste devant le bureau de tabac de la place, ouvert au public. A quelques pas de là, de jeunes danseuses se produisent dans le cadre d’une journée organisée par l’association des Femmes d’AB (Arnaud‐Bernard) qui défend « l’occupation festive, conviviale, politique, artistique, ludique d’une place publique confisquée aux femmes ». Un peu frondeur, trafiquant, militant et artiste, Arnaud‐Bernard tel qu’en lui‐même. Un quartier dont l’image et la réputation sont encore trop sulfureuses pour la municipalité : depuis quelques années, le processus de réaménagement et de « diversification » de cet ultime îlot populaire du centre‐ville s’accélère.

« Arnaud‐Ben » est un pur quartier toulousain, et ce depuis le Moyen‐Age, quand les quelques habitations de ce faubourg sont venues s’accoler à la ville. Le secteur, qui restera la porte Nord de Toulouse jusqu’en 1825, apparaît dès son émergence comme une aire de contact entre citadins et ruraux. Les paysans des alentours viennent y vendre leurs produits aux habitants de la ville. Espace de commerce, Arnaud‐Bernard va aussi recevoir dès le début du XXe siècle, les vagues successives d’étrangers qui ont fait la France : italiens dans les années 20, espagnols fuyant la dictature franquiste et enfin maghrébins (dont les harkis) issus de la décolonisation. « Différentes strates de migrations, ont composé, couche après couche, la morphologie de ce quartier du centre‐ville (…) Arnaud‐Bernard, c’est d’abord un cœur avec la place du même nom, rendez‐vous obligé des matchs de foot improvisés, des bouquinistes ambulants et des manifestations où culture et boisson font bon ménage », écrit le chercheur Slimane Touhami, docteur en anthropologie, dans l’un des rares textes « savants » disponibles sur le quartier ( « Arnaud‐Bernard, ou quand l’autre fait ville » ).

Des paysans puis des immigrés, des travailleurs et des revendeurs, fréquentant les bazars, bars et cantines, désormais des kebabs et …

Nous vous offrons l’accès à cet article

Et à toutes nos enquêtes pendant deux jours  !
Oui, on est généreux 😉 Mais pensez aussi à vous abonner  !

En renseignant votre adresse, vous acceptez nos conditions générales d’utilisation.
Mediacités s’engage à ne pas céder votre adresse à des tiers. En cas d’échec, écrivez à contact@mediacites.fr
  • J’accède aux 4 éditions de Mediacités (Lille, Lyon, Nantes et Toulouse)
  • Je découvre un média 100 % indépendant, avec 0 % de publicité

Attention, journal en danger !

Depuis huit ans, Mediacités propose un journalisme d’investigation sur les pouvoirs locaux et ses enquêtes ont de l’impact dans les villes. Aujourd’hui notre existence est menacée.
Soutenez la rédaction, ses journalistes et la démocratie locale :

Je soutiens Mediacités

  • en vous abonnant (69 € par an ou 7,90 € par mois, résiliable à tout moment et facilement) pour lire toutes les enquêtes
  • en effectuant un don (défiscalisable à 66%) pour soutenir le travail et assurer la survie d’un journal local indépendant, sans pub et à impact.

Publié le

Modifié le

Temps de lecture : 8 minutes

Favorite

Par Emmanuel Riondé

Attention : journal en danger !
Soutenez Mediacités !

Depuis bientôt huit ans, notre journal d’investigation propose des enquêtes sur les pouvoirs locaux dans les grandes métropoles. À Lille, Lyon, Nantes et Toulouse, des dizaines de journalistes publient en toute indépendance des informations inédites qui nourrissent le débat public et produisent de l’impact.
Aujourd’hui, notre campagne de financement participatif à atteint la moitié de l’objectif. Mais nous avons encore besoin de votre aide.
On vous explique tout ici :

Comment soutenir Mediacités ?

D’ici au 31 décembre, chaque coup de pouce compte !

Ceci fermera dans 25 secondes