Comédiens et employés dénoncent les méthodes des « Thénardier » des 3T

Le succès économique du café-théâtre toulousain cache une réalité sociale bien moins reluisante. Évictions brutales de collaborateurs, à qui on demande une disponibilité totale, dénigrement et humiliations des ouvreurs, comédiennes ou régisseurs... Mediacités a enquêté sur les coulisses de cet établissement réputé dans le domaine de la comédie.

2025_MARS_TOULOUSE_3T malaise social
Derrière le succès économique de l'établissement culturel, nous avons découvert une réalité sociale moins avantageuse. Montage photo Sarah Mahjoub.

Lionel* montait sur la scène des 3T « la boule au ventre » malgré ses vingt ans d’expérience. Paul* ne trouvait plus le sommeil du fait de ses conditions de travail de plus en plus dégradées. Alice* a été évincée de la programmation du jour au lendemain.

Derrière le succès de ce café‐théâtre prisé des spectateurs, la réalité est plus sordide pour les comédiens et employés confrontés à la brutalité du couple de gérants, Corinne et Edouard Pey (alias Gérard Pinter). Au point de les comparer aux Thénardier, célèbres personnages de Victor Hugo, qui, dans Les Misérables, incarnent la cupidité, la bassesse et la brutalité, selon l’encyclopédie Larousse.

Mediacités a rencontré une vingtaine d’acteurs et actrices, ouvreuse et régisseurs travaillant ou ayant travaillé dans cette institution du spectacle à Toulouse [Voir en coulisses]. Toutes et tous dénoncent un système managérial basé sur la peur, les humiliations et la loi du silence.

Depuis des décennies, les spectateurs des 3T voient se succéder sur les planches des comédiens et comédiennes qui vivent leur moment de gloire en multipliant les pièces, avant de tomber en disgrâce et de disparaître petit à petit des distributions.
Recevoir son planning… ou se faire remercier
Pour la plupart des comédiens interrogés, leur entrée aux 3T s’est faite facilement, sans avoir à passer de véritable audition, comme cela se pratique fréquemment dans le milieu. Malheureusement, leur sortie aurait été tout aussi rapide… et souvent douloureuse.

« Je ne suis pas parti de moi‐même. J’ai découvert un jour que je n’étais plus distribué », avoue ainsi Émile*, un ancien comédien. « Tu n’es jamais viré, mais tu comprends qu’il faut partir », confirme Adèle*, une comédienne encore à l’affiche de plusieurs spectacles.

Comme tous ses collègues, elle sait qu’elle peut, à tout moment, ne plus recevoir le précieux planning. Ce qui signifie implicitement qu’on est devenu indésirable. « Il y a beaucoup de roulement aux 3T. L’ambiance générale est de plus en plus compliquée. Ils se permettent de virer les gens comme ils veulent », résume Adèle. Un constat partagé par tous nos interlocuteurs.

L’une des dernières en date à avoir fait les frais de cette curieuse méthode, a été remerciée en fin d’année dernière, après cinq ans de bons et loyaux services. Elle a tenu à en informer publiquement la quarantaine de comédiens habitués des lieux.

« C’est officiel, je n’ai pas reçu mon planning pour février. Gérard m’a gentiment reçue pour m’expliquer les raisons et nous nous sommes séparés en bons camarades… Nan, je plaisante, il faudrait que l’élégance et le professionnalisme fassent partie de cette personne », a‑t‐elle ironisé dans son message posté le 17 novembre, que Mediacités a pu se procurer par l’intermédiaire d’autres témoins.

 

Dans ce même long message, la comédienne assure que Gérard Pinter lui aurait indiqué qu’elle n’était « pas aimée aux 3T » et qu’elle faisait « de la merde », alors que ses spectacles « faisaient un carton », selon elle. Et de conclure en mettant en garde les jeunes comédiens qui « débarquent dans l’aventure 3T » : « Prenez votre pied sur scène, mais n’attendez …

Nous vous offrons l’accès à cet article

Et à toutes nos enquêtes pendant deux jours  !
Oui, on est généreux 😉 Mais pensez aussi à vous abonner  !

En renseignant votre adresse, vous acceptez nos conditions générales d’utilisation.
Mediacités s’engage à ne pas céder votre adresse à des tiers. En cas d’échec, écrivez à contact@mediacites.fr
  • J’accède aux 4 éditions de Mediacités (Lille, Lyon, Nantes et Toulouse)
  • Je découvre un média 100 % indépendant, avec 0 % de publicité

Profitez de toutes nos enquêtes !

Depuis huit ans, Mediacités propose un journalisme d’investigation indépendant sur les pouvoirs locaux. Et ses enquêtes ont de l’impact !
Abonnez‐vous pour profiter d’infos exclusives sur votre ville et soutenir le travail de ses journalistes.
(69 € par an ou 7,90 € par mois, résiliable à tout moment et facilement)

Je soutiens Mediacités


Publié le

Temps de lecture : 11 minutes

Favorite

Par Armelle Parion