D’ici à la fin de l’année, la Métropole de Lyon votera son projet de Règlement local de publicité (RLP). Ce texte légiférera sur la place de la publicité dans nos rues pour les années voire les décennies à venir : taille des panneaux, espacement entre deux panneaux, heure d’extinction des enseignes et vitrines, immenses bâches publicitaires, publicités sur les toits des immeubles… et écrans vidéo publicitaires. Si le territoire de la Métropole semble moins impacté par la publicité que celui de Marseille par exemple, il l’est beaucoup plus qu’à Grenoble, qui a su dire stop au développement publicitaire. Car oui, on peut dire stop : c’est un choix politique.
Depuis près d’un an, notre collectif Plein la vue travaille ardemment pour exiger de nos élus une diminution de la pression publicitaire dans l’espace public. Pourquoi ? Vous avez déjà la réponse ! Tout le monde a au moins une bonne raison de vouloir moins de publicité autour de soi. Pour la pollution visuelle, les messages sexistes ou de malbouffe qu’elle diffuse, la consommation d’énergie, l’agression permanente et l’injonction à consommer partout tout le temps.
A ces raisons s’ajoute le danger que représentent les écrans vidéos pour la santé : ne dit‐on pas aux enfants de ne pas regarder les écrans sans arrêt ? Pourquoi, alors, étudier l’installation d’écrans de deux voire six mètres carrés dans nos rues, comme l’envisage sérieusement la Métropole ? Oui la publicité rapporte quelques subsides aux collectivités, mais pas autant qu’on voudrait le croire. La ville de Grenoble par exemple, en ne renouvelant pas un contrat de 330 panneaux en 2015, a perdu 0,1% de son budget. Dans le même temps, les économies sur le budget de communication ont été quatre fois plus importantes. Là aussi, il s’agit d’un choix politique.
En jouant sur l’émotion et l’instinct plutôt que sur la raison, les publicitaires manipulent les masses et créent des besoins. Nous consommons toujours plus, tout le temps, sans même se poser de question sur le bien‐fondé de ces achats. Edward Bernays, neveu de Freud, a été un des maîtres en la matière dans la première partie du XXe siècle. Ce « conseiller en relation publique », comme il aimait se faire appeler, a transformé les citoyens en consommateurs. Depuis, nous consommons, soutenus par ces injonctions dans la rue, sur les murs et au sommet des immeubles, dans le métro, les arrêts de bus et à l’arrière de ceux‐ci. Les publicitaires veulent même en rajouter au sol, sur les trottoirs ! Et nous ne parlons que de l’espace public, omettant smartphones, ordinateurs, télévisions, journaux…
Nos regards ne sont pas à vendre !
Selon nous, l’espace public, comme son nom l’indique, ne doit pas être le terrain de jeux du secteur privé. D’autant plus que les panneaux publicitaires ne concernent quasiment que des grands groupes, nationaux ou internationaux, ou des grandes surfaces implantées en périphérie. Ils ne favorisent en aucun cas le dynamisme économique local. Une enquête effectuée par notre collectif auprès des commerçants de proximité le démontre : seuls 4% des près des 200 interlocuteurs rencontrés ont déjà fait de la publicité sur ces panneaux.
La raison d’être d’une publicité, c’est de pousser à la consommation, encore et toujours, jusqu’à l’épuisement de la planète. La communauté scientifique tire toutes les sonnettes d’alarme à sa portée, elle n’est pas écoutée. C’est aux politiques de prendre les décisions fortes, à tous les niveaux, maintenant. Et aux publicitaires de participer à cet effort.
En rédigeant un règlement qui réduit fortement la présence publicitaire dans l’espace public, la Métropole de Lyon peut y contribuer. En baissant leurs exigences, les publicitaires peuvent également faire leur part pour la planète. Ils doivent faire cet effort.
Non la publicité dans l’espace public n’est pas une obligation. Oui il est possible de diminuer drastiquement sa place. Pour nos cerveaux, nos enfants, le climat, nous attendons des décisions ambitieuses, à la hauteur de l’attente des habitants du Grand Lyon.
A propos de l’auteur
Le collectif Plein la vue a été créé à la fin de 2017. Il a pour objectif de faire diminuer la pression publicitaire dans l’espace public du Grand Lyon. Il mène un ensemble d’actions de terrain et de communication afin de sensibiliser habitants et élus de la Métropole de Lyon. Fort de plusieurs dizaines de citoyens actifs, Plein la vue a réuni 150 personnes pour un défilé en mars et a lancé une pétition qui a recueilli 12 000 signatures.
Outre l’enquête auprès des commerçants citée dans la tribune, le collectif a rencontré de nombreux maires et groupes politiques du Grand Lyon, travaille avec les services de la Métropole, réalise des micro‐trottoirs et des actions de sensibilisation. Il est enfin soutenu par une trentaine d’organisations de tous domaines (parents, patrimoniales, confessionnelles, urbanistes, féministes, écologistes…), preuve, selon Plein la vue, « de l’aspect universel de notre combat ».
J’apréhande la généralisation de l’usage des écrans vidéos.
Je suis épileptique, et donc sensible aux images, aux rythmes et autres vibrations lumineuses.
L’usage de vidéos publicitaires, hypnotiques au plus haut point, exerce sur moi un effet de « fascination » irrépressible.
C’est très inconfortable je vous l’assure.
Et pourtant je me soigne.
Que va t‑il se passer quand ces écrans seront omniprésents ?
Je vais me mettre à convulser et à baver dès que j’arriverai sur un quai de métro??
Et dans la rue, que comptent ils faire ?
Nicolas