Dans quelques jours vont avoir lieu les élections municipales. Nous allons encore voter à l’échelle des clochers de nos anciens villages et toujours pas à celle de notre vie quotidienne, encore moins à celle des enjeux du siècle. C’est pourtant de l’échelon local qu’émergeront les solutions aux crises en cours, j’en suis convaincu. Alors ce n’est pas parce que les règles électorales sont hors d’âge que les échanges doivent être partiels et incohérents : reposons les débats sur des bases solides.
Urbaniste, je travaille chaque jour avec des élus locaux. J’ai beaucoup de respect pour celles et ceux qui s’engagent aujourd’hui. Etre élu local c’est prendre la responsabilité de gérer et de faire la ville. Cette responsabilité est immense et va devenir de plus en plus complexe, car ils auront à mener des transitions difficiles. Il leur faudra notamment apprendre à fabriquer la ville autrement.Depuis un demi‐siècle, nous avons laissé à la voiture le soin de dessiner nos villes et nos territoires. Pour quel résultat ? Une ville qui s’étend en offrant de moins en moins de services urbains et en consommant toujours plus de sol. Ce phénomène porte un nom : l’étalement urbain. La croissance de la ville consomme encore chaque année environ 30 000 hectares de sols, essentiellement agricoles. C’est l’équivalent d’une vingtaine d’aéroports Notre Dame des Landes ou de 350 Europacity tous les ans, sans provoquer de débats vifs ou de luttes acharnées.
Les effets induits de cet étalement sont pourtant très importants : perte d’un sol agricole dont nous allons avoir de plus en plus besoin, atteintes à la biodiversité, intensification du risque d’inondations, massification des déplacements, émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre, coûts des infrastructures étalées et des services diffus, mais aussi fragmentations sociales de plus en plus marquées entre les territoires.
Construire moins, réinventer plus
Alors que le choix du modèle de développement urbain est au cœur des responsabilités de nos futurs élus locaux, la question est très largement éludée dans les débats. Et pourtant, l’étalement de la ville, les bouchons sur la route, la pollution de l’air, l’augmentation des prix de l’immobilier, les ségrégations territoriales, la crise agricole, la sécurité alimentaire, la faible place donnée aux modes alternatifs à la voiture, les atteintes aux écosystèmes et le réchauffement climatique sont des facettes d’un même système en impasse. Faire la ville est devenu synonyme de construction neuve dans les champs, et c’est bien ça qu’il nous faut changer. C’est ce changement que nos futurs élus doivent mener.
Car il y a urgence. Changer la ville prend du temps, c’est donc maintenant qu’il faut faire transition pour qu’elle minimise ses impacts sur les écosystèmes, sur le climat comme sur nous‐même. Pour qu’elle soit un havre de paix, résiliente face aux éléments et non le premier des lieux à fuir par ceux qui le peuvent. Nous avons dix ans à peine pour apprendre à faire la ville de 2050. Une ville frugale, proche et pour tous.
La fabrique de la ville doit faire sa transition vers un urbanisme circulaire, frugal en matériaux et en énergies, mais surtout en espace, par l’application des principes de l’économie circulaire. Un urbanisme qui généralise les alternatives concrète à l’étalement de la ville, privilégie le recyclage des friches urbaines à l’étalement de la ville, la transformation des bâtiments existant à leur destruction, l’intensification des usages de l’existant à la construction. Nous devons apprendre à mieux développer la ville en construisant moins et en la réinventant plus.
Plus qu’une transition douce, une révolution !
Faire la ville de la proximité, c’est offrir le choix à ses habitants de laisser leur voiture au garage, en rapprochant les usages pour limiter les besoins de mobilitées et en multipliant les alternatives à la voiture. La géographie des territoires et la forme de la ville devront s’adapter, avec pour enjeu la nécessité de redonner envie de vivre dans les centralités de toute taille, du cœur de la métropole à la place du village.
Faire la ville pour tous, c’est donner à tout le monde la possibilité de vivre dans cette ville de la proximité. Bâtir une métropole vertueuse n’a aucun sens si une partie de ses habitants doit vivre dans une périphérie qui ne l’est pas (vertueuse). Nous ne pouvons continuer à entretenir un urbanisme générateur de fragmentations qui éloigne toujours plus loin ceux, toujours plus nombreux, qui ne peuvent se payer la proximité.
Bien sûr qu’il y a urgence, mais les solutions sont déjà là. Partout les pionniers montent des coalitions, testent des prototypes, forgent leurs outils. Ce n’est plus d’innovation dont nous avons besoin, mais de passage à l’acte et de massification des solutions. Mais ne nous trompons pas, ce n’est pas d’une transition douce dont il est question, c’est d’une révolution. Le pire des risques n’est pas climatique, il est de voir citoyens, professionnels et élus reculer devant la complexité, et de les voir échouer à dialoguer pour changer.
Aux citoyens de comprendre l’importance du changement de modèle et de pousser à l’accélération de la transition. Aux professionnels de repérer ce qui fonctionne, lever les verrous, diffuser et massifier les solutions. Quant à celles et ceux que nous allons élire prochainement, leur rôle sera essentiel. Ils devront montrer le cap, expliquer l’urgence et organiser la transition. Pour changer de quotidien, affronter la complexité et prendre le risque de la sincérité, chacun aura besoin de courage. De beaucoup de courage.
Très juste .il faut effectivement arrêter l “etalement urbain et tout ce qui y contribue et y encourage : accepter une certaine densification les villes ( qui n’exclut pas de oreserver de la nature en ville : les grands ensemble des périphéries comportent braucoup d’espaces vides et attificialises ), renover et rehabiliter les logements vacants , reconstituer un parc de logements locatifs appartenant aux collectivites locales et soustraits a la loi du marché qui exclut les gens modestes des centres villes métropolitains , cesser les creations et extensions de commerces en périphérie , et …trouver des solutions de transition pour les 12 a 15 millions de personnes qui vivent aujourd’hui dans des lotissements en périphérie .
Il faudrait transformer lzs espaces, rendre les lotissement indépendants d’un point de vue alimentaire, et pourquoi pas créer des frigos de quartier, pour ne pas jeter la nourriture en trop…?