C’est une première et une exception en France : en 2020, les électeurs du Grand Lyon voteront, au suffrage universel direct, pour leurs conseillers métropolitains. Le scrutin se tiendra en parallèle des élections municipales.
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Pourquoi cette « élection‐exception » dans le Grand Lyon ?
Cette élection métropolitaine unique tient au statut juridique – lui aussi unique – de la Métropole de Lyon (appelée également Grand Lyon). Depuis le 1er janvier 2015, l’ancien « Etablissement public de coopération intercommunale » – le statut commun à toutes les intercommunalités de France – est devenu une collectivité à part entière. Plus précisément, une « collectivité territoriale à statut particulier » qui hérite des compétences de l’ancienne communauté urbaine (qu’on appelait déjà le Grand Lyon) et du département du Rhône sur son territoire. Les conseillers départementaux des cantons situés dans le Grand Lyon étant jusque là élus au suffrage universel direct, c’est, logiquement, ce mode de scrutin qui a été retenu par le législateur pour désigner les conseillers métropolitains à partir de 2020.
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A quelles dates se déroulera l’élection métropolitaine ?
Les 15 et 22 mars 2020, soit les mêmes que les élections municipales. Autrement dit, les électeurs des 59 communes du Grand Lyon trouveront deux urnes dans leur bureau de vote : une pour glisser le bulletin municipal, une pour le bulletin métropolitain. La concomitance des deux scrutins était inévitable – les actuels conseillers métropolitains siègent au Grand Lyon au titre de leur mandat municipal – mais elle n’arrange pas la lisibilité de la nouvelle élection et le risque de confusion avec les municipales.
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Qui éliront les Grand Lyonnais ?
L’élection métropolitaine décidera de la composition de la prochaine assemblée du Grand Lyon, composée de 150 élus, soit quinze de moins que l’actuel conseil. Les futurs conseillers métropolitains éliront le président du Grand Lyon. Ce mandat ne pourra pas être cumulé avec celui de maire (de Lyon notamment…). Une même personne pourra se présenter sur une liste municipale et sur une liste métropolitaine (c’est le cas par exemple de l’écologiste Béatrice Vessiller à Villeurbanne et cela devrait être le cas de Gérard Collomb à Lyon). Mais rien n’oblige un candidat (tête de liste ou colistier) au Grand Lyon de se présenter à l’échelon municipal.
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Comment s’organisera l’élection ?
Pour l’élection métropolitaine, le territoire du Grand Lyon a été découpé en 14 circonscriptions – à ne pas confondre avec les circonscriptions législatives ! Certaines rassemblent plusieurs communes (comme celle baptisée « Val‐de‐Saône » qui en comptent 25), d’autres plusieurs arrondissements lyonnais voire à une partie d’un arrondissement, comme la circonscription « Lyon‐Est » qui couvre l’est du 3e (au‐delà de la ligne de chemin de fer Lyon‐Paris). En fonction de son corps électoral, chaque circonscription enverra un nombre différent de conseillers (entre 7 et 17). Celle de Villeurbanne sera la plus importante pourvoyeuse d’élus.
Dans chaque circonscription se tiendra un scrutin de liste, le même que celui applicable aux communes de 1000 habitants et plus. Autrement dit, la liste arrivée en tête bénéficiera de « la prime majoritaire », c’est-à-dire qu’elle obtiendra la moitié des sièges en jeu, l’autre moitié étant répartie proportionnellement au résultat. A noter que les listes devront alterner les candidats de chaque sexe.
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Quels candidats accèderont au second tour ?
Chaque liste ayant obtenu au moins 10% des suffrages exprimés au premier tour pourra se maintenir au second tour de l’élection métropolitaine. Et les listes ayant réalisée plus de 5% auront la possibilité de fusionner avec celles encore dans la course… sous réserve de nouer des accords.
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Toutes les communes seront‐elles représentées ?
C’est la question qui fâche. En devenant une collectivité – et en cessant d’être une intercommunalité –, les élus du Grand Lyon représentent les habitants du territoire et non plus les communes qui le composent. Conséquence, dans la future assemblée métropolitaine, certaines communes n’auraient plus de représentants, dénoncent nombre de maires de l’Ouest lyonnais concernés au premier chef. De fait, la circonscription « Val‐de‐Saône » et ses 25 communes n’enverra « que » 14 conseillers à la rue du Lac (l’adresse du Grand Lyon, dans le 3e arrondissement de Lyon). Le conditionnel (« certaines communes n’auraient plus de représentants ») reste de mise car l’argument des maires mécontents est spécieux. En étant élu au suffrage universel direct, tout conseiller devient le représentant des électeurs de sa circonscription et donc de l’ensemble de ses communes.
Cette question a été un véritable casus belli, ces derniers années, entre Gérard Collomb (à l’initiative avec Michel Mercier, ancien président du Rhône, de la création de la Métropole de Lyon) et une partie des « petits maires » du groupe Synergie‐Avenir, emmenés par Marc Grivel, le premier édile de Saint-Cyr-au-Mont‑d’Or. Au point de provoquer la scission de ce groupe sur lequel le maire de Lyon s’était longtemps appuyé pour bâtir sa majorité à l’échelle du Grand Lyon.
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Quelle logique a guidé le découpage des circonscriptions ?
Deux critères ont été mis en avant dans la définition des circonscriptions métropolitaines. Il s’agissait d’abord de respecter des limites administratives existantes, autrement dit, de ne pas faire exploser les communes (ou arrondissements) en morceaux. Seule exception : le très peuplé 3e arrondissement scindé entre deux circonscriptions, comme mentionné dans une précédente réponse. Le deuxième critère concerne l’égalité de représentation entre citoyens : le nombre d’habitants représentés par un conseiller ne doit pas varier de plus de 20% de la moyenne métropolitaine, situé à 8 831 (en moyenne, un futur élu du Grand Lyon « pèsera » 8 831 habitants du Grand Lyon). Les électeurs les mieux représentés seront ceux… du Val‐de‐Saône (un conseiller pour 7487 habitants) et les moins bien représentés, ceux de la circonscription « Plateau Nord‐Caluire » (un conseiller pour 9538 citoyens).
La question, aux enjeux électoralistes évidents, a été âprement discutée en commission des Lois du Sénat en 2015. Et pour cause : deux des principaux intéressés, Gérard Collomb, maire de Lyon et, à l’époque, président du Grand Lyon, et François‐Noël Buffet, candidat LR à l’élection métropolitaine y siégeaient. L’arbitrage final a ménagé les deux. Le découpage des circonscriptions, proposé par le gouvernement socialiste de l’époque, était défendu par Gérard Collomb (François‐Noël Buffet proposait, par amendement, de découper la ville de Lyon selon les circonscriptions législatives, dessinées à l’époque où Charles Pasqua était ministre de l’Intérieur). En revanche, l’ancien maire d’Oullins a obtenu gain de cause sur la réduction du nombre de conseillers métropolitains (de 165 à 150), toutes les circonscriptions perdant alors quelques sièges, sauf celle du Val‐de‐Saône, renforcée d’un siège par rapport à l’effectif initial.
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De quoi s’occupe la Métropole de Lyon ?
Le duel sans merci que se livrent Gérard Collomb et son ancien dauphin David Kimelfeld en est l’illustration : le poste de président du Grand Lyon concentre un grand nombre de pouvoirs, pour ne pas dire l’essentiel du pouvoir local. Si les villes restent en première ligne sur des sujets de proximité (petite enfance, écoles, propreté, police municipale), la Métropole dispose de compétences stratégiques comme les transports, l’habitat (notamment la définition du Plan local d’urbanisme et de l’habitat) ou le développement économique. Elle s’occupe également de la gestion de l’eau et des déchets, ainsi que des collèges. Enfin, elle a hérité des compétences sociales du département : insertion et emploi avec la gestion du RSA, aide sociale à l’enfance, politique du handicap ou encore du vieillissement. En 2019, le budget prévisionnel de la Métropole s’élevait à 3,3 milliards d’euros, contre 792 millions pour la ville de Lyon.
Julie Le Mest, avec Nicolas Barriquand