Géographe, Cynthia Ghorra‐Gobin est directrice de recherche émérite au CNRS, auteur, entre autres, de La Métropolisation en question (PUF, 2015). Ses travaux portent sur l’évolution des villes dans le contexte de la mondialisation et notamment sur le modèle « anglo‐américain ». Elle a récemment publié sur Métropolitiques.eu une étude comparative entre Lyon et Minneapolis‐Saint‐Paul, aux Etats‐Unis. Cette interview s’inscrit dans le cadre de notre série d’entretiens « De quoi les métropoles sont‐elles le nom ? » [lire l’encadré à la fin de l’article].
Mediacités : Nice, Lyon, Lille, Nantes… mais aussi Brest, Tours ou Nancy : au cours des années 2010, plus d’une vingtaine d’agglomérations françaises ont adopté le statut de métropole. Pour vous qui êtes géographe, qu’est-ce qui définit une métropole ?
Cynthia Ghorra‐Gobin : Avant de parler de métropole, les chercheurs ont parlé de métropolisation. On entendait par‐là la concentration des emplois ayant une valeur ajoutée dans les grandes villes et la reconfiguration spatiale qui va avec. Avec l’avènement d’un territoire métropolitain, les villes adoptent une structure polycentrique. Les emplois ne sont plus localisés dans la ville‐centre mais à l’extérieur. Aux Etats‐Unis s’est forgé, depuis les années 1990, le concept d’edge city [espace urbanisé en périphérie d’une ville où s’implantent des entreprises, des centres commerciaux et autres services]. En France, on parle plutôt de « pôles », comme la vallée de la chimie, au sud de Lyon. Aujourd’hui, toutes les métropoles développent une politique de la mobilité et s’orientent vers une configuration polycentrique. Cette évolution influe sur le sentiment d’appartenance à un territoire. Le sentiment identitaire communal est en train de s’estomper. La mobilité nous fait comprendre qu’il y a une multiplicité d’ancrages territoriaux, qu’on appartient à quelque chose de plus vaste, mais qui reste local. On est à Lyon pas seulement quand …