Leurs rédactions ont en commun de produire des enquêtes en toute liberté, sans dépendre de la publicité. Mais si des liens éditoriaux et financiers ont bel et bien été noués entre Mediacités et Mediapart, les deux entités restent strictement indépendantes.
Des questions nous parvenant chaque semaine sur notre boîte mail, c’est sans doute la plus fréquente. « Est‐ce‐que que Mediacités est une émanation de Mediapart ? », nous demandait Odile il y a encore quelques jours. Parfois, l’interrogation se fait plus méfiante : « Quels sont vos liens avec Monsieur Plenel ? », nous écrit ainsi Éric, en référence au cofondateur et président de Mediapart, Edwy Plenel.
Il est vrai que les noms de nos deux médias se ressemblent. Et puis « votre concept et votre fonctionnement sont les mêmes », nous fait remarquer Annick qui, elle, est abonnée à la fois à Mediapart et à Mediacités. Liées par une conception semblable du journalisme, ainsi qu’un partenariat éditorial et financier, les deux organisations sont cependant bien distinctes l’une de l’autre.
Mediapart et Mediacités copublient des enquêtes locales
Mediacités a été créé en décembre 2016 par sept journalistes qui travaillaient pour la plupart pour le magazine L’Express, avant son rachat par l’homme d’affaires Patrick Drahi. Aucun des cofondateurs ne figurait auparavant dans l’équipe de Mediapart, même si certains avaient déjà écrit pour le compte du journal en ligne en tant que journalistes indépendants.
Dès janvier 2017, une première collaboration éditoriale est entamée avec Mediapart sur le dossier des Football Leaks. Leur rédaction nationale nous propose alors d’accéder, aux côtés de France 3 Hauts‐de‐France, à des données confidentielles récupérées par le consortium European Investigative Collaborations (Collaborations européennes d’investigation). L’objectif : unir nos forces pour dévoiler les montages et méthodes de Gérard Lopez, qui vient alors de reprendre le club de foot lillois du Losc.
« Certaines enquêtes locales de Mediapart ont toute leur place chez Mediacités. Et inversement. »
Cette première expérience se révèle concluante. Les méthodes d’enquête de nos journalistes sont comparables, de même que leur combat pour révéler des informations d’intérêt public. Durant la première année d’existence de Mediacités, nos journalistes réalisent ainsi d’autres enquêtes en commun avec Mediapart, par exemple sur les affaires immobilières de l’assureur lyonnais April ou sur l’évasion fiscale mise en lumière par les Malta Files.
En parallèle de ces coopérations ponctuelles, nous avons vite compris que certaines enquêtes locales de Mediapart avaient toute leur place chez Mediacités, par exemple lorsque nous n’avions pas eu connaissance des informations révélées ou que nous n’avions pas le budget suffisant pour enquêter. Et inversement, lorsque notre ancrage local nous permettait d’avoir accès à des informations inédites susceptibles d’avoir un écho et un intérêt national. Nos deux médias ont ainsi conclu un accord pour s’échanger, à titre gracieux, des enquêtes parues chez l’un ou chez l’autre.
Récemment, nous avons par exemple republié une enquête de Mediapart sur le passe‐droit obtenu par Airbus pour recevoir des masques de protection durant le pic épidémique de Covid‐19, alors même que ces équipements manquaient dans les hôpitaux. De son côté, la rédaction de Mediapart a hébergé sur son site l’analyse de Mediacités Nantes sur les conséquences de la crise du coronavirus sur Les Herbiers, une zone économique parmi les plus dynamiques de France.
À l’approche des élections municipales 2020, nous avons entamé un nouveau type de partenariat éditorial avec Mediapart. Durant toute la durée de la campagne – y compris jusqu’au second tour finalement organisé dimanche 28 juin –, Mediacités perçoit une rémunération forfaitaire pour la reprise d’enquêtes et d’analyses locales sur Mediapart. Exemple avec ce récent article de Mediacités Lyon sur l’alliance inattendue de Gérard Collomb (LREM) avec la droite pour l’élection métropolitaine. À noter que Mediapart a également conclu un partenariat avec d’autres médias indépendants régionaux : Le D’Oc à Montpellier, Marsactu à Marseille, Le Poulpe à Rouen, etc.
Les journalistes de Mediacités sont également invités de temps à autre dans les émissions vidéo de Mediapart pour faire le point sur la campagne en cours dans nos villes. Une visibilité bienvenue alors que, pour de nombreux médias, les enjeux municipaux ont été relégués loin derrière les suites de la crise sanitaire et que la campagne parisienne accapare le (faible) temps d’antenne alloué aux élections.
Mediapart est un actionnaire (très) minoritaire de Mediacités
Aujourd’hui, notre lien avec Mediapart ne se limite pas à la sphère éditoriale. Les rencontres se sont enchaînées entre les deux entreprises, par exemple pour partager des bonnes pratiques en matière de communication ou de marketing. Il faut dire que nous avions beaucoup à apprendre du succès de Mediapart, un site lancé en 2008 auquel « personne ne croyait » alors et qui affiche aujourd’hui 210 000 abonné·e·s.
En avril 2018, notre collaboration avec le site d’investigation national s’est renforcée : Mediapart est entré au capital de Mediacités à l’occasion d’une levée de fonds qui aura permis de réunir 431 000 euros. La société apporte alors la somme de 50 000 euros dans notre capital. En février 2020, une nouvelle levée de fonds de 207 000 euros est bouclée par Mediacités pour accélérer son développement. Cette fois, Mediapart n’y participe pas.
« Mediacités n’est ni une filiale, ni une « émanation » de Mediapart »
Aujourd’hui, Mediapart possède exactement 3,48 % des parts sociales de l’entreprise Mediacités. Avec 56 % des parts, les cofondateurs restent majoritaires au capital. Le reste des actions est détenu par un total de 108 actionnaires particuliers, dont 70 réunis au sein de la Société des Amis de Mediacités – des proches ou des abonné·e·s qui ont souhaité nous donner un coup de pouce.
Comme tout autre actionnaire minoritaire, Mediapart participe à nos assemblées générales annuelles. Mediacités n’est donc ni une filiale ni une « émanation » de Mediapart. D’ailleurs, nos amis du site d’investigation indépendant Marsactu, à Marseille, sont dans le même cas de figure : Mediapart a investi une somme minoritaire au capital de leur entreprise, qui est majoritairement détenu par les fondateurs.
Marsactu, Le D’Oc, Le Poulpe… Quelques médias locaux en France ont en commun avec Mediacités d’enquêter en profondeur sur des domaines peu abordés par les autres groupes de presse locale. Ils ne vivent que des abonnements de leurs lectrices et de leurs lecteurs et ne proposent aucune publicité. Tous s’inspirent du modèle de Mediapart, de cette idée que « seuls leurs lecteurs peuvent les acheter », mais ils volent de leurs propres ailes. Pour porter cette belle idée que l’investigation est indispensable tant au niveau national qu’à l’échelle de nos villes.
bonjour
serait‐il possible de me tenir informé sur l’avancement des investigations de la Brigade Financière concernant l’organisme HLM ALTEAL anciennement COLOMIERS HABITAT ?
Pourriez‐vous m’adresser un mail à ce sujet car un différend m’oppose à cette société ? à reribera@orange.fr
dans cette attente
recevez mes meilleures salutations
Raymond RIBERA
Bonjour, cette information renforce mes inquiétudes sur le prisme de plus en plus à gauche de Mediacites dont je suis abonné de longue date. Elu local j’ai apprecié l’independance de ton et le sens de l’investigation de Mediacite. Ça penchait un peu à gauche, soit.. Un media independant à soutenir. Premiere alerte un article très à charge contre Fathia Boudjalat militante de gauche anticommunaitarisme. Deuxième alerte, un article très complaisant sur Taha Bouhafs, et puis je vois que Mediapart prend des parts.. devient le plus gros actionnaire.. En parallèle les enquêtes se concentrent sur les élus de droite et EELV hegemonique à Lyon beneficie d’une paix royale en depit de son management à la hussarde. Alors en quoi dépendre de Plenel est plus rassurant que de Niel ou Bolloré ?
Bonjour Dominique Mounier,
Je vous remercie de nous livrer avec sincérité – et sans langue de bois ! – votre appréciation sur nos écrits. J’y réponds sans tarder afin de tenter de vous rassurer sur notre positionnement. Dès notre création, fin 2016, nous avons prôné un journalisme non partisan (cf notre « Manifeste fondateur » : https://www.mediacites.fr/forum/national/2016/11/30/notre-manifeste/ ) et nous n’avons pas l’intention d’en changer. Cependant, et vous le savez bien, l’objectivité totale n’existe pas en journalisme. Nos enquêtes passent par le filtre personnel de leurs auteurs. Nous expurgeons au maximum les commentaires mais une teinte demeure. C’est sans doute ce que vous avez ressenti à la lecture de certains de nos articles. Il n’en reste pas moins que nous ne sommes pas là pour penser à la place de nos lecteurs mais bien pour lui apporter de l’info aussi juste et honnête possible (à défaut d’objectivité totale) pour qu’ils se fassent leur propre opinion.
Sur Taha Bouhafs, il s’agit d’une reprise d’un article de Mediapart, site de presse qui est soit dit en passant à l’origine des révélations sur les vraies raisons (peu glorieuses) du renoncement de ce candidat aux législatives. Nous avons en effet un accord sur des échanges croisés d’articles entre Mediapart et Mediacités, ce qui nous permet de réaliser quelques menues économies. Ceci me permet de vous dire que Mediapart n’est pas – et de loin ! – le plus gros actionnaire de Mediapart puisqu’il ne dispose que de 3,15 % des parts. La majorité du capital est détenue par les fondateurs de Mediacités, pour l’essentiel d’anciens journalistes de L’Express, ainsi que par notre Société des amis (https://www.mediacites.fr/mon-compte/devenir-societaire/). C’est un gage supplémentaire d’indépendance à laquelle nous tenons comme la prunelle de nos yeux.
J’espère avoir répondu à vos inquiétudes.
Bien cordialement,
Jacques Trentesaux
Directeur de la rédaction de Mediacités