La justice a ordonné à Mediapart de ne pas publier une enquête concernant le maire de Saint-Étienne. Une censure inacceptable qui porte atteinte à la liberté de la presse.
Émile de Girardin et Eugène Lisbonne doivent se retourner dans leurs tombes. 141 ans après le vote de leur grande loi, celle du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, des magistrats remettent brutalement en cause cette avancée démocratique fondamentale.
Vendredi 18 novembre, le président du tribunal correctionnel de Paris a ordonné à Mediapart de ne pas publier, après l’affaire du chantage à la sextape contre son premier adjoint, de nouvelles révélations sur les pratiques politiques de Gaël Perdriau, le maire (ex‐LR) de Saint Etienne. À la demande de ce dernier, la justice réhabilite une arme d’Ancien Régime – la censure préalable - en recourant à une procédure relevant des tribunaux de commerce. On se pince pour être certain de ne pas cauchemarder.
C’est la seconde fois en quelques semaines que le droit à l’information est attaqué si violemment. Le 6 octobre, le tribunal de commerce de Nanterre n’avait pas hésité à interdire à Reflets.info de publier « de nouvelles informations » sur le groupe Altice et son président Patrick Drahi au nom du secret des affaires. Une décision rendue possible par la loi du même nom, portée en 2018 par l’ancien député La République en marche Raphaël Gauvain. Promulguée la même année, elle portait en germe le risque d’atteinte à la liberté d’expression.
Epée de Damoclès
Aux procédures baillons, aux multiplications des plaintes pour diffamation que subit notamment Mediacités, s’ajoute cette nouvelle épée de Damoclès au‐dessus des journalistes. Cette recrudescence des attaques contre la liberté de la presse est inquiétante. Toute l’équipe de Mediacités ne peut que le déplorer et le dénoncer en apportant son soutien à nos confrères et consœurs de Mediapart ou de Reflets.info.
La France doit s’honorer d’avoir édifié un texte magnifique en 1881 qui consacre le principe intangible de la liberté de la presse. Toute entaille à ce texte, toute tentative de contournement fait courir un risque notable pour notre démocratie. Magistrats et personnel politique doivent se ressaisir. Privilégier les intérêts de quelques‐uns au détriment de l’intérêt public, c’est affaiblir l’œuvre républicaine si durement édifiée dans notre pays.
Mise à jour du 22 novembre 2022 – 19h15 : Aux côtés d’une soixantaine de sociétés de journalistes, de médias, de collectifs et d’associations de défense du droit à l’information, Mediacités apporte tout son soutien à l’équipe de Mediapart. Et dénonce la censure préalable d’une de ses enquête, sans débat contradictoire. Coordonnée par le collectif Informer n’est pas un délit, la tribune dont Mediacités est signataire dénonce « cette censure préalable, décidée sans débat contradictoire, qui constitue une grave et flagrante attaque contre la liberté de la presse ».
La censure est un vrai scandale d’Etat, la France est ruinée, le FMI nous dit d’arrêter avec la politique du “quoi qu’il en coûte” qui vide nos caisses sans contrepartie et la seule chose que font nos dirigeants c’est rétablir la censure.
Vous êtes de nombreux médias à souffrir de la censure, je lisais que le Point va porter plainte car un juge leur refuse l’accès aux dossiers qui leur permettaient tous les ans de publier un classement des hôpitaux et cliniques
Nos journaux télévisés ne sont plus que des lecteurs des infos fournies par l’Elysée, de fait, ce sont des méthodes dictatoriales.
Je suis bien entendu d’accord avec votre révolte contre les attaques subies par la liberté de la presse, mais il faudrait peut‐être préciser dans votre article que la décision du tribunal de Nanterre est liée très précisément au fait que les informations diffusées par Reflets ou Mediapart ont comme origine un piratage avec demande de rançon à Altice, ce qui est bien entendu condamné par la loi. Il est bien évident que celle de 1881 n’avait pas prévu ce cas de figure.
Jean‐Paul Flipo
Jean‐Paul Flipo,
Vous avez, à votre tour, omis de préciser que si dans l’affaire Gaël Perdriau piratage il y a, il est le fait dudit Gaël Perdriau lui‐même. En effet, les « sextape » mises en cause ont été enregistrées à sa propre demande et, in fine, il s’est retrouvé pris à son propre piège.
Il faut réagir !! les lecteurs ne peuvent ils pas intervenir ?
Bonjour,
S’abonner à une presse indépendante est, à mon sens, la meilleure des réponses.
INADMISSIBLE