Après sa victoire aigre‐douce contre Mediacités, Patrick Ollier face à un nouveau front judiciaire

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Patrick Ollier, 78 ans, maire de Rueil-Malmaison depuis 2004, lors du conseil municipal du 3 octobre. Capture d'écran Ville de Rueil/YouTube

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Par Jacques Trentesaux

Condamné pour diffamation le 3 octobre par le maire de Rueil-Malmaison, Mediacités a immédiatement interjeté appel. Trois jours plus tard, Patrick Ollier est sous le coup d’une nouvelle plainte pour « détournement de fonds publics » et « prise illégale d’intérêts », comme le révèle Libération.

C’est une première dont Mediacités se serait bien passé. Le 3 octobre, le tribunal de Nanterre a condamné notre journal, pour la première fois de son histoire, à 6 000 euros d’amende pour diffamation envers Patrick Ollier, maire de Rueil‐Malmaison (Hauts‐de‐Seine), ancien ministre et président du Grand Paris, et François Le Clec’h, son premier adjoint. 

L’article, publié dans nos colonnes le 15 avril 2021, révélait l’existence d’une plainte de l’association de lutte contre la corruption Anticor pour « détournement de fonds publics », « prise illégale d’intérêts » et « faux et usage de faux » à la suite d’opérations immobilières. Nous évoquions aussi l’existence de liens d’affaires entre Sébastien Ollier (fils de…), Alain Luca, le directeur général des services de la ville, et Patrick Quinteiro, un promoteur très présent dans cette commune huppée de l’Ouest parisien de 78 000 habitants. Nous avons aussitôt décidé d’interjeter appel. 

« La décision de la 14e chambre du tribunal judiciaire de Nanterre est incompréhensible, indique Vincent Fillola, avocat de Mediacités. Les juges ont estimé qu’il n’y avait pas de base factuelle suffisante pour établir une corrélation entre les terrains acquis avantageusement par les proches d’Ollier et la vente d’un bâtiment communal à Patrick Quinteiro. Mais tel n’était pas l’objet de l’article. Mediacités s’est contenté d’avancer des éléments factuels et nous avons produit une quarantaine de pièces en ce sens. » 

Une nouvelle plainte contre Patrick Ollier

Ce 3 octobre, Patrick Ollier, 78 ans, n’a pas manqué d’exulter lors du conseil municipal. « On a gagné le combat contre la médisance et la malhonnêteté intellectuelle, s’est‐il réjoui (…) C’est un grand bonheur. Cela démontre que ce qu’on fait est dans la transparence et l’intégrité et l’honnêteté de chacun d’entre nous. » Patrick Ollier n’aura pas eu l’occasion de se réjouir très longtemps. Dix jours plus tard, nos confrères de Libération révèlent l’existence d’une nouvelle plainte pour « détournement de fonds publics » et « prise illégale d’intérêts » contre celui qui dirige aux destinées de Rueil‐Malmaison depuis 2004.

La plainte a été déposée le 6 octobre par les agents territoriaux de Rueil. Ils suspectent la municipalité d’employer depuis près de huit ans une trentaine d’agents administratifs sur des postes politiques, directement rattachés au cabinet du maire dirigé par Aurélien Mallet. Soit dix fois plus que le seuil légal autorisé. Un travers assez fréquent – comme ici dans le département du Nord, là dans le département de Haute‐Garonne, ou encore en région Auvergne‐Rhône‐Alpes – qui a déjà abouti à de sévères condamnations.

L’un de ces emplois fait tout particulièrement grincer des dents : celui du responsable du pôle communication digitale. Son titulaire, âgé de 28 ans, aurait débuté comme stagiaire en 2019 avant de connaître une ascension expresse qui ne respecterait pas, selon les plaignants, les règles habituelles en matière de recrutement. Et Libération de s’interroger : « Faut‐il voir un lien avec le fait que le jeune homme est accessoirement le fils d’un ancien maire adjoint de Patrick Ollier, aujourd’hui président de la société historique de la ville, [une association locale] dont Ollier est le président d’honneur ? »

Nos confrères apportent aussi des compléments précieux à notre enquête sur les liens entre Patrick Ollier, Alain Luca, Sébastien Ollier et le promoteur Patrick Quinteiro. Ils révèlent que ce dernier aurait pris « pour cinquante euros » une participation de 5 % dans la SCI créée trois ans plus tôt par le DGS Alain Luca en vue d’acheter un terrain à bâtir. Trois ans plus tard, le terrain et la maison étaient revendus 2,9 millions d’euros. À l’époque, Alain Luca est encore DGS de Rueil‐Malmaison. À ce titre, il aurait pris plusieurs arrêtés favorables à Patrick Quinteiro et signé quatre transferts de permis de construire favorables au promoteur… dont l’un concernerait directement le terrain de Sébastien Ollier. 

Soupçon de prise illégale d’intérêts

Pour les agents CGT de la ville, ces faits s’apparentent à une prise illégale d’intérêts. Cette affaire est, si elle est prouvée, « symptomatique de la collusion de plus en plus fréquente des élus des communes avec les promoteurs et les aménageurs au profit de logiques privatives et mercantiles, estime leur avocat, Jérôme Karsenti, cité par Libération. Trop d’élus aujourd’hui perdent de vue la défense de l’intérêt public. »

Ces nouveaux éléments viennent appuyer l’enquête ouverte en novembre 2020 par le Parquet de Nanterre à la suite d’un premier signalement d’Anticor et la publication d’enquêtes dans Mediapart. Une procédure qui a connu une accélération soudaine à la suite de la plainte pour « détournement de fonds publics », « prise illégale d’intérêts » et « faux et usage de faux » déposée par Anticor le 23 mars 2021, dont nous avions révélé l’existence. Coïncidence troublante, le domicile de Patrick Ollier et la mairie de Rueil‐Malmaison ont été perquisitionnés quinze jours plus tard par la Brigade de répression de la délinquance économique (BRDE).

Patrick Ollier n’en a donc pas fini avec ses ennuis judiciaires. Alain Luca, l’ex-DGS de Rueil‐Malmaison, ne peut pas davantage crier victoire. En juin dernier, il a subi une garde à vue de douze heures dans les locaux de la BRDE pour expliquer ses relations avec le promoteur Patrick Quinteiro mais aussi les avantages qu’il a reçus de la municipalité, dont un luxueux logement de fonction ainsi que nous le racontions en détail le 19 avril 2021… Une enquête qui nous vaut d’ailleurs un deuxième procès pour diffamation intentée Alain Luca. Mais l’engorgement de la justice est tel que l’audience de plaidoirie n’a été fixée qu’au 7 janvier… 2025 !

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