Le conseil de déontologie journalistique et de médiation épingle La Dépêche du Midi

Avis CDJM Mediacites vs DDM juin 2024

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Par Gael Cérez

Au nom de Mediacités, j'ai saisi le conseil de déontologie journalistique et de médiation contre La Dépêche du Midi qui avait repris nos informations sans nous citer. Le CDJM vient de nous donner raison, soulignant le manquement déontologique du journal de la famille Baylet. Explications.

Quand un outil existe, il faut s’en servir. Et si on estime qu’un média a manqué à ses obligations déontologiques, il est possible de saisir le Conseil de déontologie journalistique et de médiation (CDJM). C’est ce que j’ai fait, en janvier dernier, en tant que citoyen, journaliste et rédacteur en chef de Mediacités Toulouse. Mon objectif : demander un avis sur un comportement que j’ai jugé non confraternel de la part de La Dépêche du Midi.

Lundi 8 janvier 2024, Mediacités publie une enquête sur des maltraitances dans un Ehpad de Toulouse, intitulé « “Espèce de bâtard” : révélations sur des maltraitances dans un Ehpad toulousain ». Celui‐ci révèle des enregistrements sonores prouvant de la maltraitance sur un résident, ainsi que la plainte de sa famille. Le lendemain, Mediacités publie un deuxième volet de l’enquête intitulé « Ehpad : Les plaintes s’accumulent contre le groupe DomusVi ». D’autres maltraitances et plaintes y sont détaillées.

Reprendre les confrères sans les citer

Un jour plus tard, La Dépêche du Midi publie, mercredi 10 janvier donc, un article mono‐sourcé titré « “Espèce de bâtard” : l’enregistrement qui accable un Ehpad toulousain poursuivi pour maltraitance ». Celui‐ci ne fait évidemment aucune mention de notre double publication préalable, alors qu’il n’apporte aucune nouvelle information par rapport à nos publications.

La « DDM » peut se prévaloir d’avoir déjà écrit sur cet Ehpad précédemment, mais la moindre des choses aurait été de citer la concurrence quand celle‐ci l’informe d’un nouvel élément sur le dossier. Ce n’est malheureusement pas la première fois que ce journal procède de la sorte, malgré nos protestations. Ces pratiques portent préjudice à Mediacités, dans la mesure où elles invisibilisent notre travail, voire nous spolient. D’où mon envie de marquer le coup cette fois‐ci en saisissant le CDJM, le 11 janvier 2024.

Après plusieurs mois de travail, le conseil déontologique a publié sa réponse début juin. Dans un avis détaillé, il conclut que « La Dépêche du Midi a enfreint la règle déontologique qui oblige un journaliste à citer les confrères dont il utilise le travail ». « Mediacités est indubitablement le premier média à rapporter l’existence des enregistrements », note l’instance qui poursuit : « Il apparaît donc que La Dépêche du Midi s’est saisie de l’affaire des enregistrements après avoir découvert l’enquête de Mediacités, voire en raison de cette enquête. »

Le double manquement de La Dépêche du Midi

Afin de rendre sa décision, le CDJM a contacté Gilles Souillés, l’auteur de l’article de La Dépêche du Midi, qui lui a « adressé une réponse franche et rapide ». Notre confrère – et néanmoins concurrent – avoue sa surprise de ne pas s’être vu offrir « la primeur » des enregistrements par la famille de la victime avec laquelle il était déjà en contact. Partant du principe que celle‐ci lui a transmis les enregistrements par la suite, Gilles Souillés estime que « s’il est question de déontologie, je ne vois donc pas de souci avec une quelconque exploitation d’informations provenant de Mediacités puisque j’ai toujours eu les miennes ».

Le CDJM est d’un autre avis : « M. Souillés et La Dépêche du Midi n’avaient d’autres choix, au plan déontologique, que de citer Mediacités comme révélateur de cette information nouvelle sur un dossier suivi, tant au regard de l’obligation qui impose au journaliste de citer « les confrères dont il utilise le travail », qu’à celle qui dicte à ces mêmes producteurs d’information de faire « preuve de confraternité et de solidarité à l’égard de leurs consœurs et de leurs confrères ».

L’avenir dira si La Dépêche du Midi profitera de l’occasion pour améliorer ses pratiques…  

Qu’est‐ce que le CDJM ?

Une centaine de conseils de déontologie journalistique ou conseils de presse existe dans le monde, dont 18 dans l’Union européenne. Le CDJM français a été fondé le 2 décembre 2019. Son but est de répondre « à la crise de confiance du public envers les médias et aux tentatives de manipulation de l’information ».

Organe professionnel d’autorégulation, indépendant, le CDJM se définit comme « une instance de médiation et d’arbitrage entre les médias, les rédactions et leurs publics, enfin, une instance de réflexion et de concertation pour les professionnels et de pédagogie envers les publics ». Il regroupe l’ensemble des éditeurs et des journalistes, tous médias confondus (presse écrite, radio, télévision, numérique, agences) à l’échelle nationale, ainsi que des représentants des publics.

Ni conseil de l’ordre, ni « tribunal de la pensée », il rejette « toutes les saisines concernant la ligne éditoriale ou les choix rédactionnels, qui sont libres et demeurent l’apanage des rédactions sous l’autorité du directeur ou de la directrice de publication ». Il ne prononce pas de sanctions pénales ou financières, se contentant de rendre public ses avis.

  • Bonjour. Vous avez parfaitement bien fait de vous indigner. L’avis rendu confirme le bien‐fondé de votre réaction, et comme vous le soulignez justement, il est déplorable de vous invisibiliser ainsi alors que vous avez su, davantage que votre « confrère » gagner la confiance de la famille pour qu’elle vous confie cet enregistrement. Grand merci pour votre travail et celui de Mediacités. Tenez bon. Continuez. Vincent

  • Merci Gael pour cette action efficace pour obliger à faire respecter des pratiques déontologiques. C’est malheureusement un voeu pieux pour ceux qui, comme moi, ont cessé de lire les produits de la famille Baylet (La Dépêche du Midi, Midi Libre, L’Indépendant, Centre Presse, la Nouvelle République des Pyrénées, le Petit Bleu d’Agen) depuis l’affaire Baudis où cette même Dépêche avait battu tous les records d’indignité.
    Heureusement qu’il y a, dans notre région, « Médiacités » et le trimestriel « L’empaillé » .
    Continuez dans cette voie d” une écriture libre.

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