Vingt‐trois mille euros de dettes cumulées auprès de ses proches pour se payer ses doses, une hospitalisation de sevrage, un manque ressenti au quotidien… Coralie* connaît la même descente aux enfers qu’une junkie, sauf que son produit se trouve en pharmacie. « Je suis droguée sur ordonnance depuis vingt ans », témoigne‐t‐elle, l’air éteint, de lourdes valises noires sous les yeux.
La quinquagénaire est devenue accro au fentanyl, un puissant antidouleur. Comme le tramadol, il fait partie de la famille des opioïdes, responsables en vingt ans de 500 000 morts par overdose aux États‐Unis. En 2015, 10 millions de Français·es, soit 17 % de la population, s’étaient vu prescrire ces puissants antalgiques, selon l’Agence nationale de sécurité du médicament. À Coralie, la médecin généraliste a prescrit du fentanyl sans l’avertir du risque de dépendance, sous sa forme qui rend le plus accro, un applicateur buccal qui en fait une sorte de sucette.
Le produit se diffuse directement dans la gencive pour atténuer dans la foulée le supplice, mais induit aussi un effet de